Madagascar recherche 3 étalons en France

19/01/2019 - Actualités
 Victime d'un déclin après une période d'apothéose dans les années 70, les courses de Madagascar tentent de se relancer avec leur propre élevage local, qui a besoin d'importer 3 nouveaux étalons PS. Découvrir les détails d'une histoire étonnante.

 
 
Ancienne colonie française, au large de la côte Est de l'Afrique, Madgascar possède un système de courses aujourd'hui méconnu du monde, alors qu'il a connu une grande période avant 30 ans de déclin. Ce pays, qui a vu monter Yves Saint-Martin mais aussi Eric Hoyeau en tant que tout jeune gentleman-rider, continue de faire naître une quarantaine de poulains PS par an pour faire courir. Mais les dernières importations d'étalons ayant eu lieu dans les années 2000, l'élevage se retrouve dans une situation de consanguinité. Les allocations, maigres, sont financées grâce au PMU qui propose aux joueurs malgaches de miser sur les courses françaises, contre des royalties pour l'organisation locale.

Ancien gentleman-rider, désormais installé à La Tour du Pin en région lyonnaise, Eddy Marzel s'est organisé avec les autorités locales et la compagnie aérienne Air France pour réaliser l'importation de 3 étalons. Les budgets sont forcément limités (1000 € / cheval), donc les exigences ne sont pas si élevées. Il faut des chevaux bien nés qui n'ont pas couru, des compétiteurs en fin de carrière de course ou des étalons qui n'ont plus la cote dans l'hexagone. pour tous renseignements, vous pouvez contacter Eddy Marzel au 06 68 68 99 25. Ce dernier nous livre ci-dessous un résumé de l'histoire des courses à Madagascar.
 
 

 
 
 
RETROSPECTIVE
 
 
Les premiers chevaux sont arrivés à Madagascar en 1817. En effet, le Roi RADAMA Premier était intéressé par la modernisation de son armée. Grâce aux conseils de James Hastie, un Écossais de l’armée des Indes, Brady, un mulâtre de Jamaïque et Robin, un Français déserteur de l’île de la Réunion, le Roi reçu en cadeau 6 chevaux provenant de l’île Maurice. A eux trois, ils ont réussi à moderniser une armée organisée de façon empirique, ce qui a permis au monarque de conquérir toute l’île. Ce fût un Roi passionné par l’équitation et qui la pratiquait quotidiennement pendant 2 heures.
 
Durant la colonisation, plusieurs apports sont arrivés sur l’île, notamment des poneys de l’Inde, des chevaux de l’Est Africain, de chevaux Arabes, de chevaux d’origines Australiennes, de purs sang Anglais venant de France et quelques rares chevaux de trait. C’est le croisement de toutes ces races qui a donné le standard actuel des équidés à Madagascar. L’administration coloniale a mis en place des stations de monte, depuis la capitale jusque dans les régions d’élevage équines. La Société d’Encouragement de Tananarive a été créée au début des années 1900. Elle était l’autorité organisatrice des courses à Madagascar. Depuis l’indépendance, ces stations de monte ont maintenu leurs activités, jusqu’à la fin des années.
 
 

Alain Badel
 

Rish Vola
 
 
Le cheptel équin de Madagascar ne cesse de régresser depuis TROIS décennies. Les régions berceaux d’élevages se sont vidées de leur cheptel. Seule, la région de la capitale a su maintenir une production minime. Ce sont beaucoup plus les clubs hippiques de la capitale et quelques riches propriétaires qui maintenaient cet élan d’élevage. Il faut noter que les clubs achetaient les chevaux à un tarif plus élevé. La production de chevaux a subi une autre vocation, non plus pour les courses en premier lieu mais pour les clubs également.
 
 

 
Yves Saint-Martin
 
 
 
Le déclic en 1968
 
La mise en place du Tiercé en 1968 a donné un nouvel élan aux courses à Madagascar, dans les années qui venaient, les courses de chevaux ont atteint leurs sommets, des amateurs, de nouveaux propriétaires sont apparus. A cette époque, le cheval de course rapportait, et leur prix étaient décents. Les sociétés de courses avec l’appui du pouvoir en place ont instauré des politiques d’amélioration de la race chevaline par l’importation d’étalons purs sang de France. Les allocations des courses étaient complétées par des rations de paddy pour chaque cheval ayant couru (en moyenne 30 Kg par course). Les aides en médicaments, vermifuges et soins vétérinaires faisaient partie de droits des éleveurs. Les allocations permettaient de nourrir toute une famille. Les grands prix maintenus jusqu’à présent sont : Le prix des Zazakely, le grand prix de L’élevage, le grand Prix des Mimosas. Le plus grand prix de l’époque était le « sweepstake de Madagascar réservé aux chevaux de la première catégorie. Il avait la particularité de se courir en Handicap et le gagnant ne peut le recourir. Seuls les prix des Zazakely, le grand prix de Tananarive étaient courus sur le même poids quel que soit l’âge et le sexe des participants. Les propriétaires et éleveurs avaient la motivation de produire et faire courir. C’était une fierté d’avoir des chevaux de course, d’avoir ses propres couleurs. Les chevaux étaient magnifiques.
 
 

 

 

 

L'apogée des années 70

 
Les masses de jeu des paris atteignaient des niveaux stratosphériques. Les parieurs ne manquaient une réunion de course à Mahamasina pour rien au monde. Les courses de chevaux ont pris une dimension populaire dans le bon sens du terme. Il y avait de la motivation pour les parieurs tant sur les gains partagés, que sur le spectacle. Pratiquement tout le monde connaissait les origines des chevaux, leurs exploits. On avait hâte de revoir les produits des chevaux partis à la reproduction. Il y avait autant de paris sur une course des jamais gagnants qu’aux courses de la première catégorie. C’était une machine qui fonctionnait à merveille, tout y était pour développer encore plus les courses. L’amateurisme (Gentlemen Riders et Cavalières) s’est développé encore plus. Madagascar était le premier pays en dehors de l’Europe à faire partie de la FEGENTRI. Nos cavaliers se sont distingués dans des réunions à l’étranger, car le niveau National a beaucoup évolué. Les jockeys Malgaches ont su améliorer leurs montes. Des échanges avec des pays limitrophes ont été organisés. Tout cela donnait lieu à des spectacles magnifiques et populaires. D’autres Sociétés de courses ont vu le jour, et le nombre de partants pouvait satisfaire les réunions de ses sociétés simultanément en un weekend. On organisait le déplacement des parieurs depuis la capitale vers Ambatolampy ou Antsirabe. Des journaux hippiques ont fait leur apparition. Les pronostics, les programmes, les rapports, les confidences des professionnels, tout y était. La société mère a même construit un nouvel hippodrome à Bevalala, c’est encore une autre histoire. Les caisses étaient remplies, et on se permettait de placer cette liquidité dans des bons du trésor. C’était vraiment la belle époque des courses de chevaux.
 
 
 
 
 
 
Le socialisme provoque le déclin
 
Le socialisme débarque à Madagascar en 1976. Une nouvelle idéologie surgit de nulle part, les paris étaient vus d’un très mauvais œil par la nouvelle administration, et l’équitation était considérée comme un sport de riches. Le pays est rentré dans un marasme économique sans précédent, la monnaie perd de sa valeur à vitesse grand V, les produits d’importations se font rares, sinon chers et cela n’arrangeait pas non plus la situation. Les queues pour les produits de première nécessité, l’essence, le pain et le riz. Du jamais vu dans le pays. L’hippodrome de Mahamasina en plein centre de la capitale appartient à la commune urbaine de Tananarive. Durant cette période, l’Etat et ses collectivités avaient besoin d’argent pour renflouer leurs caisses respectives. Ils ont donc pris la mesure de taxer : 20% du chiffre d’affaire pour l’enregistrement et timbre, 20% pour la commune de Tananarive, et 10 % pour la location du stade de Mahamasina. A cette époque, avec une réunion de course la société parvenait à faire un chiffre de 13 000 000 Fmg* ( avec le taux d’inflation et le taux de change, ceci représenterait 80 000,00 € actuellement) dans lequel il fallait amputer les allocations pour les propriétaires, les gains pour les parieurs et les frais de fonctionnement.
 
 

Patrick Nicot
 

La foule sur la piste à l'arrivée !
 

Pascal Adda
 
 
 
Automatiquement, les paris n’étaient plus attractifs, les parieurs ont préféré les paris sur les combats de coqs ou des jeux de carte informels. Il est à noter que les seuls paris autorisés aux ressortissants Malgaches étaient les paris hippiques. Pratiquement 50 % des recettes étaient partis pour les caisses de l’Etat. Automatiquement, les premières victimes étaient les propriétaires et les parieurs. Toute la filière allait subir de plein fouet cette décadence. Le cheval est devenu un animal qui coûte cher à l’entretien, des propriétaires ont abandonné leur passion, des écuries sont tombées en décrépitudes, les paysans sont revenus chez eux, utilisant le cheval comme bétail pour le fumier. L’importation d’étalons a été abandonné depuis belle lurette par les autorités. Quelques réunions de courses ont été organisées à Ambatolampy, Bevalala ou Ambohimandroso. On organisait des courses grâce aux sponsors, il n’y avait pratiquement plus de paris sur les hippodromes. On y allait pour le spectacle, et encore, puisque les chevaux n’avaient plus les mêmes standings que ceux d’avant. Il y a eu également les triches organisées au sein même de quelques sociétés de courses. Ils ont fait cela pour attirer encore plus les parieurs, vu le montant affiché aux gagnants. Il ne faut pas oublier que ces sociétés étaient en concurrence, or l’effet escompté n’était pas au rendez-vous, au contraire çà a refroidi les ardeurs des parieurs. Tout le monde s’y est mis le dos au pari, même les professionnels, ce qui a valu une mauvaise réputation du monde des courses. Tout le monde a été catalogué MAGOUILLEUR. Petit à petit, la masse de jeu s’est amenuisée et a fondu comme neige au soleil. Il n’y avait plus de place pour plusieurs sociétés de course. Les sociétés restantes ont résisté tant bien que mal à la conjoncture de l’époque. Les parieurs venaient encore aux courses, mais avec un budget limité.
 
L'arrivée des sud-africains.
 
L’arrivée de chevaux sud-africains dans les années 90 allait redonner un nouvel élan pour la filière. Une nouvelle société des courses a été créée, le MAORAHAU (une autorité des courses en gros). Les chevaux étaient sous leur responsabilité. Ils étaient loués, et les propriétaires louaient à l’année ou pour une période plus longue. De nouveaux propriétaires sont arrivés sur le monde des courses, mais le système n‘a pas pris comme ils l’espéraient. Il faut dire que les propriétaires aiment bien avoir sous leur main leur chevaux, ce qui n’était pas le cas. Le terme de propriétaire pleinement n’existait pas. Seuls les chevaux nés et élevés à Madagascar, gardaient ce statut. Et les allocations étaient inégales, une trop grande différence entre les chevaux importés et les chevaux locaux. Je ne sais par quel problème, mais les sud-africains ont abandonné les courses, en mettant en vente tous leurs chevaux. Ces chevaux sont arrivés chez des propriétaires, qui n’ont jamais eu de pur-sang. Le taux de mortalité est très élevé. Quelques-uns ont été repris par des propriétaires confirmés, et envoyés à la reproduction, d’autres sont partis dans des clubs hippiques. L’apport en sang neuf de cette importation n’a pas donné des résultats probants. Seuls quelques chevaux descendants subsistent mais n’ont ni la morphologie ni les performances d’un pur-sang. Je pense que l’une des raisons de ce désastre réside même dans le fait des moyens des propriétaires. Un pur-sang demande beaucoup de moyens d’entretien, car c’est un animal fragile malgré sa force.

Des étalons ont été importés depuis le déclin de l’élevage de chevaux. Citons IRISH STEW, ARSAKIDE, BABY GRAND depuis l’Île MAURICE ; LE BRIGAND, GAMBLERS HARVEST, FRANC MOINE, ORYXX, TABORNOCK et WEST BEST depuis La France. Malheureusement, je n’ai pas en ma possession, la liste des chevaux reproducteurs, issus de la dernière vague d’importation depuis l’Afrique du Sud. Ces étalons ont donné de très bons poulains, mais le problème qui subsiste est le moyen des propriétaires. Quelques propriétaires ayant des moyens ont pu avoir des beaux poulains issus de leur élevage. Ils ont mis les moyens financiers pour avoir ces résultats. Citons en exemple Gérard Robert, Jean Claude Izouard, Gérard Monloup et quelques propriétaires dans les clubs hippiques. Et ils ne faisaient pas pouliner leurs juments régulièrement. Quelques étalons locaux ont donné des bons poulains également, citons par exemple JOLI PRINCE, NORTH STAR, JUPITER etc... En revanche, la majorité des propriétaires ne pouvaient plus entretenir leurs chevaux comme dans le temps. Beaucoup de poulains issus de très bonnes poulinières arrivent sur les champs de courses rachitiques avec beaucoup de défauts d’aplombs. C’est vraiment dommage car nous sommes en pleine dégénération de la race. Un phénomène non négligeable également qui a endommagé beaucoup la race chevaline est l’absence d’étalons. Il y eu une période où le seul étalon qui restait était GOYACHKA. Cet étalon a sailli pratiquement toutes les juments de la région d’Ankaratra, ensuite les descendants se sont reproduits entre eux, et ça a mené à la catastrophe : LA CONSANGUINITE. Ce phénomène continuera de s’accentuer si on ne prend pas des dispositions drastiques et radicales. Les étalons que nous avons actuellement, sont issus de la troisième génération des croisements entre les trois derniers étalons importés de France avec des juments autochtones ou importées d’Afrique du Sud au milieu des années 2000. Ce spectre de la consanguinité plane gravement sur les futures générations, faute d’apport de sang nouveau. Les chevaux sont devenus rachitiques et fragiles, on ne voyait que de rares poulains robustes et bien portants. 

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