Y-a-t-il un point commun entre Alain de Royer-Dupré et un sorcier africain ?

22/07/2010 - Actualités
"C’est le seul groupe 1 de Longchamp qui manque à mon palmarès. Normal que j’accepte dans mes rangs un cheval capable de gagner le Prix de l’Abbaye de Longchamp !" nous avait confié Alain de Royer Dupré pour commenter l’arrivée de War Artist en début d’année chez lui. Ce sprinter peut compléter à l'automne pour au mentor attaché aux Aga, une collection de succès finalement assez patchwork et même exotique. Sans sorcellerie.

 

Ce samedi 17 juillet dans le sprint Prix de Ris-Orangis (Gr.3), la nouvelle recrue War Artist (Orpen) a prouvé que le maître a vu juste. C’est un cheval d’Abbaye, épreuve dont il a d'ailleurs conclu 3e l'an dernier, alors sous l'entraînement anglais de JMP Eustace. Pour s’en convaincre il devance un compagnon de cour Tiza dont la valeur est aujourd’hui bien connue…surtout de leur entraineur commun.

 

Alain de Royer-Dupré fait le jumelé gagnant du Prix de Ris-Orangis (Gr.3) avec War Artist, un australien, et Tiza, un sud-africain

 

En France on aime coller des étiquettes et ranger dans des tiroirs étroits et aussi poussiéreux que la façon de faire précitée des hommes et des femmes aux qualités variées. Malgré son aura (justement nous y reviendrons), Alain de Royer Dupré ne peut échapper à la règle. Son étiquette à lui, elle est verte à épaulettes rouge. Alors certes il y a plus difficile à porter et supporter comme costume, mais Alain de Royer Dupré n’est pas que l’excellent entraineur du Prince Aga Khan.



Point comptable.



En plus des 75 représentants princiers placés sous les ordres d’Alain de Royer Dupré et de son équipe, il faut ajouter 70 chevaux de trente cinq propriétaires différents ! (à titre de comparaison, Elie Lellouche réunit 25 propriétaires, Pascal Bary une trentaine, Jean-Claude Rouget plus de 50!). Cette année, avec 71 chevaux ayant couru l’entraînement Royer Dupré a enregistré 39 succès en France et occupe la 3e place provisoire aux gains derrière Jean-Claude Rouget et André Fabre mais avec "seulement 170 partants" : le chiffre le moins élevé du top 7 (c’est par exemple 2 fois moins que Jean-Claude Rouget).

 

Alain de Royer-Dupré, devenu progressivement un entraîneur "fashionable"



Après les verts, les bleus !


Mis à part les chevaux du Prince Karim et de la Princesse Zahra, le propriétaire le plus présent chez Alain de Royer Dupré n’est autre que l’écurie Wildenstein ! Des yearlings avaient en effet rejoint la team à l’automne dernier. Aujourd’hui, ils sont sept poulains et pouliches de deux ans, tous ayant droit à la prime à l’élevage et tous encore inédits. L’arrivée des bleus chez Alain de Royer Dupré fut un signe fort. De la part de l’émetteur tout d’abord : depuis la séparation avec André Fabre, les bleus étaient placés sous la responsabilité d’Elie Lellouche et de Dominique Sépulchre (pour quelques éléments seulement en région ouest). Pour le récepteur aussi : Alain de Royer Dupré est assez incontournable pour réunir dans ses écuries les Wildenstein, la Marquise de Moratalla, Malcolm Parrish, des élevages importants comme ceux du Mézeray ou de la Perelle, Enrico Ciampi, des anglais, des américains, des russes. Il fut aussi l’entraîneur des chevaux de feu Benjamino Arbib, brésilien de son état, pour qui il a gagné le Prix Ganay (Gr.1) avec Dark Moondancer, recruté en cours de carrière.

 

Pride, la meilleure de tous les chevaux "non Aga" d'Alain de Royer-Dupré

 


La cour des miracles ?



Installé en 1983 à Paris pour prendre la succession de François Mathet à la tête des chevaux Aga Khan, Alain de Royer Dupré a très vite installé une deuxième cour, celle des autres propriétaires. Alors que tous les matins les chevaux princiers arrivent de leur domicile privé d’Apremont, les autres Royer viennent eux d’une cour attenante à la piste des Aigles. C’est là que Pride vivait son quotidien. La championne Pride élevée par Sven Hanson et Carina Klimberg, couple suédois, tombé amoureux l’un de l’autre et de la Normandie où Pride grandit. La pouliche débute sous l’entraînement de John Hammond avant de partir en Angleterre. En quatorze mois, la pouliche voit du pays avant de trouver enfin où se stabiliser : chez Royer Dupré le rassurant. Gagnante d’un Gr.3 dès sa deuxième tentative pour son nouvel entraineur. Pride atteint le sommet d’un succès de groupe 1 à l’âge canonique de 6 ans dans le Grand Prix de Saint-Cloud. Elle aurait pu (dû ?) gagner l’Arc dans la foulée mais contentera ses propriétaires en décrochant à Newmarket les Champion Stakes puis à Hong Kong la Hong Kong Cup. L’aura du maître dépasse les frontières Françaises.

 

Alain de Royer-Dupré, à l'entraînement sur les Aigles



En Afrique, on a coutume de dire " vous les blancs, vous avez des montres, nous, on a le temps…". Alain de Royer Dupré sorcier africain ? Jusqu’à preuve du contraire non. Mais patient, sûrement. Le fils de directeur du Haras du Pin, excellent cavalier, se passionne aussi pour l’éthologie. Très attentif à la santé de ses pensionnaires, M. Royer Dupré met l’accent sur le bassin des chevaux, cherche toujours ce qui peut générer quelque gêne, fait appel à un ostéopathe dès qu’il le juge nécessaire et ne court jamais un cheval si un seul doute subsiste (voir les chiffres exposés plus tôt). Le catalogue du savoir faire est encore plus épais mais notons aussi son acuité au poids de ses coursiers : chaque cheval est pesé, tout poids est consigné et toute alerte est aussitôt analysée.


Autant de signes ostentatoires du goût du détail et du professionnalisme voire parfois d’un esprit maniaque, qui séduisent et rassurent des investisseurs internationaux, eux-mêmes souvent habitués à la réussite dans les affaires, beaucoup moins aux approximations. Un savoir faire mis aussi au grand jour : rares sont les refus de communiquer, de transmettre ou d’expliquer. Alors que la tension monte au plus haut, Alain de Royer Dupré a toujours ouvert ses portes à des cohortes de journalistes la semaine de l’Arc. Pourquoi ? "Parce que lorsqu’on a un être aussi exceptionnel que Dalakhani ou Zarkava (il a dit exactement la même chose pour les deux), ce serait vraiment dommage de ne pas partager ses moments avec le plus grand nombre". Propos d’une grande classe, très habiles et alimentant son image presque parfaite.

 

Sabana Perdida, montée chez Royer-Dupré jusqu'à un succès de Gr.2 à Ascot



C’est ainsi que Sabana Perdida (transformée de bonne pouliche en Italie à gagnante de Gr.2 à Ascot à 4 ans), Sweet Hearth (de gagnante de Listed en Italie à 2e de Gr.1 en France), le Sud Africain Perfect Season (vainqueur à Longchamp), le globe trotter Linngari, ou encore la Brésilienne Light Green (multiple placée de Groupe) sont venus grossir les troupes internationales d’une cour quatre étoiles.

Samedi, c’est l’ancien anglais d’origine australienne War Artist qui a offert un nouveau groupe à la maison Royer, toute heureuse de signer même le jumelé avec…le Sud-Africain d’origine Tiza…lui-même propriété du sudiste Jean-Claude Séroul. Monsieur Séroul qui ne compte que deux chevaux chez Alain de Royer Dupré sur les soixante qui représentent ses couleurs orange et gris : Tiza donc et Gris de Gris autre vrai cheval de Gr.2. Comme dirait Gilles Barbarin, grand rival d'Alain de Royer-Dupré au tennis de table, "c'est de la bien belle ouvrage".
 

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