L'élevage de Pur-Sang en liberté à 3000 m d'altitude au Kirghizistan

07/10/2016 - Découvertes
  Dernière étape de votre voyage au Kirghizistan, la découverte de l'élevage des chevaux, notamment pur-sang, en liberté dans en environnemet de haute montagne est une forme de bonus, aussi la dernière pièce du puzzle qui permet de comprendre l'âme et les méthode de ce peuple de cheval, qui ne voit les choses très différemment de nous, français, mais qui les voit très bien aussi.

 

Dans ce haras, il n'y a pas d'écurie. Seulement un parc clos par un mur de pierre et 2 cabanes, ou plutôt 2 minuscules cahuttes en toile, distantes de plusieurs kilomètres, et qu'un poêle brûlant surchauffe pour tenter de sécher un peu des occupants lorsqu'ils s'y réfugient après avoir pris le pluie toute la journée. Car ici, sur cet "alpage" vaste de 1500 hectares, sur les hauteurs de Cholpon Ata au Kirghizistan à 3000 m d'altitude, il pleut tout le temps. Les montagnes retiennent les nuages, les éclairs lézardent le ciel matin et soir, le tonnerre gronde en permanence. Terre d'orage, on se croirait dans une scène des mythes antiques avec Thor dans une colère noire.

En fait, on est tout près du lac Issyk Kul, un hâvre de paix et d'eau chaude et transparente, mais il faut quand même 2 bonnes heures de 4x4 lada sur une piste trempée et défoncée pour accéder à Boz Ala, l'ancien élevage d'Etat de l'époque bolchévique, lorsque le pays faisait partie de l'Union Soviétique sous le joug de Moscou, et qui est resté un haras national. Miracle, à peine 15 minutes après notre arrivée dans cet environnement incroyable, où on commence à apercevoir au loin les hordes de chevaux en liberté et un cow-boy kirghize qui revient de sa tournée d'inspection au bout des jumelles de son collègue, le ciel bleu qui vient de la vallée eclaircit soudain le ciel.

 

 

 Et c'est une merveille, grandiose, rude et infinie qui s'offre à nos yeux. Ce qui est bizare, c'est qu'on se croirait...aux Etats-Unis ! Vous savez, ces paysages époustouflants du far west montagneux de l'époque des cow-boys et des indiens si bien mis en scène par les John Ford ou autres réalisateurs de western. Ici, ce serait plutôt le nord sauvage comme le Montana ou le Wyoming, mais pas le Canada car il n'y a plus d'arbres à cette altitude, avec des grands espaces entrecoupés de canyons, habités par des loups, des trappeurs, et des gardiens plus de chevaux que de vaches. On est pourtant en Asie Centrale, à des années-lumières de l'Amérique des pionniers, sur les contreforts de l'Himalaya que la civilisation nomade traverse depuis des milliers d'années, bien avant les commanches, peaux rouges et autres John Wayne. Mais au Kirghizistan, pas de cinéma, pas d'image, pas d'explorateurs si ce n'est le fameux Przewalski (le même qui a découvert le cheval préhistorique à la fin du 19e siècle dans la Mongolie voisine). Autrement dit, l'inconnu...

 



 

Coincé dans la zone la reculée du monde, entre la Chine de l'ouest, le Kazakhstan et le Tadjikistan, donc très proche de l'Inde du Nord, de l'Afghanistan, le Pakistan, du Tibet et de la Mongolie, le Kirghizistan est le genre d'endroit où personne n'est jamais allée et que personne ne peut placer sur la planète lumineuse de notre enfance, sans l'aide de google map ! Ceci étant, cela ne les empêche pas d'avoir des Iphone, des clés 3G qui , d'écoutez en boucle le tube de jeunes de Willy William, ">Ego (je vous jure que c'est vrai).

Mais quand même, ce que les Kirghizes font de mieux, c'est du cheval. Tout d'abord, il faut dire qu'il y en a partout, à chaque coin de rue, sur les bords de toutes les routes, dans les champs, les terrains vagues, partout. Mais sans doute pour la 1e fois dans ce genre d'endroit, les chevaux sont tous en état. Les animaux des ville, par exemple, ne sont pas des esclaves dont le bât masque à peine les eau et les os, tandis que ceux des campagnes ne sont pas des ruines ambulantes. Si les gens sont durs avec les chevaux comme avec eux-mêmes, si le mot bisounours ne se traduit pas en Kirghize, si on y abrège vite les souffrances d'un animal accidenté, les animaux sont entretenus et très bien exploités pour ce qu'ils ont à faire: le travail, les courses mais aussi et surtout le transport des personnes.

 



 

Elevés donc partout dans le pays, les chevaux, et essentiellement les animaux d'élite et de compétitions, grandissent de façon tout à fait organisée en altitude en été et en vallée en hiver. Ainsi, le haras national détient des écuries un peu bringebalantes, datant de l'époque soviétique, à 2 pas de l'hippodrome et des écuries d'entrainement de Cholpon Ata. Mais dès que le temps le permet, entre avril et octobre, tous les chevaux montent dans les estives. C'est ainsi qu'on peut retrouver sur le plateau de Boz Ala la centaine de poulinières du haras et sa production. Les animaux sont partagés en 4 troupeaux, un par race, dont 2 sont élevés pour les courses : les hambleurs et les pur-sang. En effet, ces pur-sang "comme chez nous" grandissent dans ces conditions de semi-liberté, après avoir été conçus dans la vallée par les étalons du haras. ce sont bel et bien des pur-sang, sauf que la grande majorité des souches proviennent des chevaux de l'ancienne Union Soviétique et des pays de l'Est (surtout la Pologne), c'est à dire des animaux totalement inconnus dans nos pédigrées "occidentaux". Bref, c'est un autre monde du cheval de courses...

 


Les écuries d'hiver, en bas des montagnes, à seulement 1600 m d'altitude.
 


On ne le fait jamais d'ordinaire, mais là quand même, après ce tournage où nous avons partagé le sentiment d'avoir fait les plus images les plus belles et les plus incroyables de notre vie professionnelle, nous nous sommes fait prendre en photo tous les deux, Arnaud Poirier et Yannick Leboeuf, autour du gardien des purs-sang, Jumabel Merat Talai.

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