Prix de l'Arc de Triomphe : Bluestocking et la longue histoire d'amour de Khalid Abdullah avec l'Arc

La 103^e édition du Prix de l’Arc de Triomphe s’annonçait particulièrement ouverte, aucune candidature ne se détachant clairement avant le coup. Alors que le terrain était juste souple lors de la journée de samedi, la pluie dominicale a nettement alourdi la piste, rebattant ainsi les cartes de la plus grande course du monde. Supplémentée contre la somme de 120 000 €, Bluestocking et son entourage ont vu d’un bon œil ce changement de météo. Les parieurs aussi d’ailleurs puisque la pouliche de Ralph Beckett a vu sa cote fondre comme neige au soleil de 12 à 6/1 en final.

 

 

   Le ciel était gris et la piste très souple pour ce Prix de l'Arc de Triomphe 2024 ©APRH

 

 

En l’absence de leaders, le train ne fut pas effréné dans l’épreuve, Los Angeles étant laissé seul aux commandes, libre de dicter le ton. A l’amorce de la descente, Haya Zark qui était parmi les chevaux de tête fut malheureusement victime d’une fracture, causant beaucoup de grabuge au sein du peloton. De par le manque de train, la tâche s’annonçait ardue pour les attentistes. A l’entrée de la ligne droite, un quatuor de quatre chevaux composé de Los Angeles, Bluestocking et des Wertheimer Sosie et Aventure se détachait. C’est finalement un duel 100% féminin auquel nous avons assisté, puisqu’Aventure et Bluestocking ont bataillé férocement, avant que la dernière citée ne parvienne à prendre un avantage décisif.

 

 

 

 Bluestocking inscrit son nom au palmarès de la reine des courses ©APRH

 

 

Bluestocking devant Aventure, il s’agit de la même arrivée que le Prix Vermeille (Gr.1) il y a trois semaines. Comme dans la préparatoire, Bluestocking a un temps paru dominée par sa cadette mais sa ténacité et sa classe ont fait la différence. Révélée sur le tard, Bluestocking avait croisé le fer avec les meilleures pouliches de sa génération à 3 ans sur la distance classique sans réussir à remporter la moindre course l’an dernier. A 4 ans, après un long break, la fille de Camelot a gagné un Gr.2 pour sa rentrée puis les Pretty Polly Stakes (Gr.1) devant l’excellente Emily Upjohn. Battue par Goliath dans les King George, puis 4^e de City of Troy dans les International Stakes, Bluestocking a connu un été chargé mais n’a jamais été aussi forte. Une question se pose maintenant pour son entourage : quelle suite de carrière pour Bluestocking ? Le haras ou les courses ?

 

 

   La Team Juddmonte gardera t-elle sa championne à l'entraînement en 2025 ? ©APRH

 

 

 

Même s’il nous a quitté en 2021, le Prince Khalid Abdullah continue de vivre grâce à ses champions et sa si élégante casaque verte, blanche et rose. Dans les années 50, alors qu’il est adolescent, le jeune Prince tombe amoureux des chevaux en se rendant sur l’hippodrome de Longchamp. A la fin des années 70, la saoudien investi de plus en plus dans les chevaux et développe progressivement son élevage. Acquis à Keeneland, Dancing Brave et Rainbow Quest vont faire entrer le Prince dans une toute autre dimension. En 1985 et 1986 ces deux légendes des courses vont permettre à Abdullah de soulever le trophée du Prix de l’Arc de Triomphe. Suivront, Rail Link, Workforce, la reine Enable et donc Bluestocking. Avec ce sacre feu le Prince Khalid Abdulllah dépasse l’iconique Marcel Boussac et devient seul recordman de succès dans la reine des courses.

 

 

 

 Khalid Abdullah grand amoureux de la France lors de son 4e Arc avec Workforce en 2010 ©APRH

 

 

Lors de son décès en 2021, de logiques interrogations quant à la possible fin de l’empire mondial créé par Abdullah ont émergées. Finalement, comme après la disparition de Cheikh Hamdan al Maktoum, les héritiers continuent de faire perdurer l’héritage hippique de Juddmonte. Ils continuent de faire confiance à l’anglais Ralph Beckett à qui ils confient chaque année certains yearlings les mieux nés de l’élevage. L’an dernier, le tandem avait touché du doigt le sacre dans l’Arc avec Westover, avant de voir leurs espoirs réduits à néant par l’accélération dévastatrice d’Ace Impact. Cette année, grâce à Bluestocking et une monte au millimètre de Rossa Ryan (qui fut la fameuse victime du coup de coude de Christophe Soumillon l’an dernier ndlr), Beckett remporte le graal.

 

 

 Ralph Beckett et Rossa Ryan ©APRH

 

 

 

Bluestocking est la fille de deux vainqueurs de Gr.1 : le Coolmore Camelot et l’élève maison Emulous. Entraînée en Irlande par le mythique Dermot Weld, cette dernière avait remporté les Matron Stakes sur le mile de Leopardstown. Bluestocking semble ainsi avoir davantage hérité de la tenue de son père Camelot (bien qu’il fut un lauréat de Guinées !), que de la vitesse de sa mère, qui a également gagné Groupe sur 1400 mètres. Bien que la plupart des produits de la production d’Emulous soient vainqueurs, aucun d’entre eux ne fut capable de réussir au niveau black type avant Bluestocking.

 

 

 Emulous, la mère de Bluestocking ©APRH

 

 

 

Courageuse et lutteuse, Bluestocking a vraisembleblement hérité des qualités de son arrière grand-mère Queen of Song, une véritable jument de fer américaine. En effet, dans les années 80, cette fille de His Majesty a remporté 14 de ses 58 sorties publiques, dont la plupart étaient au niveau Groupe et Listed. Lors d’une vente d’élevage à Keeneland, le Prince Abdullah le propriétaire de cette lauréate de Gr.2 contre un chèque de 700 000 dollars. Un achat qui s’avéra payant puisque Queen of Song est devenue l’une des juments de base de Juddmonte, étant à l’origine de 16 lauréats individuels de Goupe, dont Mandaloun, vainqueur sur tapis vert du Kentucky Derby édition 2021 après la disqualification pour dopage de Medina Spirit.