A SINGAPOUR avec Smoking Sun et S. Pasquier : tout sauf un jour de galère

21/05/2014 - Découvertes
Pour son 1e voyage, le 5 ans français Smoking Sun a conclu 2e du hongkongais Dan Excel de la Singapore Airlines International Cup 2014, Gr.1 sur 2000 m doté d'1,8 millions d'euros sur l'hippodrome de Kranji à Singapour. A cette occasion, la vaste équipe des baroudeurs de France Sire TV composée de 2 personnes, c'est à dire papa (Arnaud) et maman (Lise) vous propose un reportage de découverte des courses sur cet étrange ilot de l'Asie du Sud-Est. Vous verrez tout, vous saurez tout sur la zizi. Enfin l'Asie quoi, vous aurez compris.

 

C'est quand même un drôle d'endroit pour faire des courses. Posé presque sur l'équateur, Singapour vit dans une atsmosphère chargée d'un taux d'humidité frôlant les 100%, accompagnée d'une chaleur étouffante, même quand les pluies diluviennes bloquent la vue à 2 mètres. Mais cela n'a jamais arrêté le rosbifs sportman. En effet, Singapour, posé stratégiquement au croisement des océans indien et pacifique dans le détroit de Malacca, est un magnique carrefour commercial, l'un des fleurons du grand Empire britannique de la belle époque qui a permis aux courses de s'exporter partout dans le monde même dans les lieux les plus saugrenus pour satisfaire au loisir préféré des colons anglais.

Ainsi naquirent les courses à Singapour il y a plus de 170 ans, dès 1842. A l'indépendance en 1965, Singapour a choisi l'autonomie totale et s'est même détachée du Royaume de Malaisie qui riait aux ambitions de ce minuscule territoire de 700 kms carrés dénué de toute ressource naturelle et même d'eau potable. Mais si varié soit-il car s'y cotoient les communautés chinoises (majoritaire et acharnée), indienne (laborieuse et paisible), malaise (tranquille et pas nerveuse) et eurasienne (les blancs expatriés en beau costume avec femme parfois importée oisive), le singapourien est uniformément bosseur. De toute façon, les allocations chômage n'existe pas. Un gouvernement très autoritaire dirige le peuple d'un main de fer avec des objectifs simples et clairement affirmés : la proprété des lieux (chewing gum interdit, grosse amende pour un mégot jeté par terre), l'harmonie entre les communautés par des systèmes de quotas stricts dans les plans d'habitation afin d'éviter la ghettoisation, le développement économique sous le contrôle rigoureux d'un Etat omniprésent mais en même temps très sympathique en terme de fiscalité. Bref, très loin de l'Asie sulfureuse à l'ancienne mais toujours en vigueur dans certains pays proche comme la Thaïlande. Même si on aime bien ça, on n'a pas trouvé de massage heureux ni de résidus d'opium dont le consommation nous aurait conduit directement à la potence....

 

 

Fini la fête du slip. Singapour, c'est le business : un port gigantesque, des raffinerie de pétrole, une bourse et un marché des changes, tous placés dans le top 5 mondial ! Pour 1000 courses par an, il y a 1400 chevaux qui disputent de belles allocations (prix de base à 40.000 €) lors des 100 réunions organisées 2 fois par semaine, le vendredi soir et le samedi après-midi. Les grandes tribunes climatisées, accessibles aisément par la sortie de métro construite à quelques mètres de l'entrée de l'hippodrome, se remplissent aisément, avec par exemple 20.000 personnes pour la réunion internationale. " Mais nous avons des challenges importants face à nous" explique Tze Ming Soon, vice-président du club. " Non seulement nous devons lutter contre le bookmaking illégal, qui est très important et contre lequel le gouvernement met des moyens, mais désormais nous avons la rude concurrence des casinos, autorisés à Singapour depuis 2010. (NDLR : en seulement 4 ans, les 2 casinos de Singapour qui attirent les flambeurs chinois de tous les pays alentour, atteignent des chiffres d'affaires tels qu'ils sont dans le top 3 mondial avec Las Vegas et Macao ! " Par ailleurs, nous devons faire beaucoup d'effort envers la jeunesse. La moyenne d'âge est assez élevée à Singapour (espérance de vie de 84 ans !) et notre clientèle aussi. Il faut convaincre les jeunes attirés vers de nouveaux loisirs que les courses ne sont pas un jeu d'argent pour retraités mais un très beau sport avec beaucoup d'émotions." Amusant de constater que ce discours est le même quasiment partout dans le monde...

 

 

 Difficile de dire que l'amour du cheval des sportmen anglais soit toujours de rigueur. Ce qui compte ici, c'est la flambe, les numéros. Les gens jouent les jockeys. Les turfistes adoraient Joao Moreira, le puncheur du Brésil, qui a tout gagné à Kranji avant de partir à Hong Kong. Ils sont bien aimé des français dont certains ont passé des saisons complètes ici comme Stéphane Pasquier, Olivier Doleuze, Olivier Plaçais ou plus récemment Davy Bonilla. Actuellement, l'anglais Alan Munro, ancien partenaire du crack Generous et grand voyageur, représente l'ancien empire colon. Mais même si les jockeys n'ont aucune limite quant aux coups de cravache, les chevaux bénéficient d'un cadre de vie particulièrement agréable dans les écuries d'entrainement qui longent le tournant après les tribunes. Alors que la surpuissante Hong Kong manque cruellement de place entre les écuries à 3 étages, les barns de Singapour à 2 étages sont vastes (bien sûr climatisés), entourés de petits paddocks bien verts et disposés entre de grandes allées ombragés. Tout y est évidemment entretenu à la singapourienne. Nickel chrome. En plus, certains des plus chanceux peuvent partir en vacances au nord, en Malaisie, soit dans le grand haras national d'Ipoh, soit dans les Cameron Highlands, au coeur de la jungle montagneuse et fraîche.

Le niveau général des concurrents est moins élevé que celui de Hong Kong, équivalent à Macao. Pour trouver les chevaux à acheter, les propriétaires ne se permettent pas d'importer des européens, car les prix sont élevés à cause de l'euro fort et des couts d'un long transport. Ils se fournissent en Australie et en Nouvelle Zélande, plus proches avec un choix pléthorique d'animaux nés pour la vitesse et donc à l'aise par nature sur le système asiatique qui comporte beaucoup de sprints. Ce sont des australiens qui ont apporté les 2 grands titres de gloire internationale aux courses de singapour : le vieux lion Ouzo, premier et resté dernier vainqueur local de la Singapore International Cup à 7 ans lors de l'édition inaugurale de 2000 devant la superstar tricolore Jim and Tonic, et Rocket Man, une bombe qui a offert au pays sa 1e victoire de Gr.1 hors de ses frontières lors du Dubai Golden Shaheen 2011 à Meydan.

 



Pour autant, c'est bien l'élevage de la vieille Europe qui a rafflé la mise lors de la réunion internationale 2014 à Singapour tant dans le KrisFlyer Sprint sur 1200 m avec Lucky Nine (Dubawi) que dans l'International cup avec Dan Excel (Shamardal), deux britanniques issus d'étalons de Darley ayant débuté en Angleterre/Irlande avant d'être exporté à Hong Kong.

Une nouvelle fois, Hong Kong démontre son très haut niveau pour les sprints. Ainsi, Lucky Nine, déjà vainqueur de cette épreuve l'an dernier, a pulvérisé toute opposition pour remporter la 14e victoire de sa carrière sous la selle de Brett Prebble qui explique : " Ah c'est tout l'inverse d'un tracteur. Quand vous le monter, vous avez juste à attendre avant d'appuyer sur bouton. Et mettre les gaz. Vous avez l'impression d'avoir 20 kilos dans chaque bras. Dès que je lui ai demandé, il m'as mis une accélération fantastique. C'est une drôle de sensation. C'est vrai que Hong Kong détient probablement les meilleurs ou certains des meilleurs sprinters du monde, mais il ne fait pas oublier que cela dépend de l'élevage australien, qui produit d'excellents chevaux de vitesse, où nous fournissons en masse. Pour de multipes raisons, les chevaux australiens sont parfaitement taillés pour les sprints et notamment sous des climats asiatiques."

Exception qui confirme la règle, Lucky Nine est iss de Dubawi et d'une fille Belle Genius (Moyglare Stud Stakes, Gr.1), né en Irlande chez Darley et ayant débuté sa carrière dans la verte Erin avant d'être exporté chez Caspar Fownes. Agé de 7 ans aujourd'hui, il affiche un magnifique palmarès, ayant déjà remporté chez lui la Hong Kong Sprint (Gr.1) en 2012 et deux fois le Chairman's Prize (local Gr.1). Comme le voit, Hong Kong n'hésite pas à sortir la grosse artillerie pour gagner à l'étranger, en l'occurrence un prix doté de 700.000 €.

 

Lucky Nine (Dubawi) s'est envolé dans le KrysFlyer Sprint sous la selle de Brett Preble.

Le même type de succès s'est répété dans la plus belle épreuve. Entraineur tête de liste à Hong Kong, John Moore, le frère de Gary Moore, présentait ainsi le duo de favori de la Singapour Airlines International Cup, Gr.1 doté d'1,8 million d'euros avec Military Attack (un irlandais par Oratorio) avait remporté cette épreuve l'an dernier devant Dan Excel (autre irlandais par Shamardal). Le Japon a quant a lui délégué, de retour à Singapour après une longue absence (mais dont l'hymne sonne toujours mal aux locaux vu que les exactions de l'occupation pendant la 2e guerre mondiale n'ont toujours pas été expiées) présente le puissant Tokei Halo (Gold Halo), dauphin de la dernière Hong Kong Cup.

Face à ses ogres globe trotters, le grand bai brun français Smoking Sun, récent vainqueur du Prix d'Harcourt, Gr.2 à Longchamp, voyage pour la 1e fois à 5 ans, monté par Stéphane Pasquier qui porte la casaque Niarchos. Son entraineur Pascal Bary connait bien cette course pour l'avoir déjà enlevé en 2009 avec Gloria de Campeo, qui avait décroché le record de l'épreuve en 1'59'2 sur 2000 m. Pascal Bary était même alors le 1e français à s'imposer ici, la star Jim and Tonic ayant conclu 2e des 2 premières éditions 2000 et 2001. Depuis, Chinchon a fait sonner la marseillaise en 2012.

Dan Excel devance l'excellent finisseur français Smoking Sun et le tenant du titre Military Attack à l'arrrivée de l'International Cup.



Victoire d'un nouveau délire de son jockey nippon Shii, Tokei Halo imprime d'emblée un train d'enfer, ce dont profite les hongkongais, habitué aux départs canon avec un parcours en or dans son sillage. En revanche, le grand Smoking Sun, partant de plus d'un très difficile n°11 dans les stalles, et lui peu habitué aux rythmes surchauffés se retrouve débordé à l'arrière-garde.

Dans la ligne droite en montée, que Tokai Halo trouve logiquemet trop longue, Dan Excel monté par Tommy Berry prend la mesure et donc sa sa revanche sur Military Attack, quand soudainement Smoking Sun trouve le bon tempo et finit comme une balle pour prendre une très encourageante 2e place. " Je ne voulais pas le mettre dans le rouge au début, mais à la fin quand il a trouvé son action, nous marchions sur les autres. ce 1e voyage à l'étranger est très concluant" commentait Stéphane Pasquier, en accord avec Pascal Bary : " Quand on le voit si bien finir, on peut regretter qu'il n'ait pas gagné mais ce test réussi nous permet de programmer des courses aux Etats-Unis, à Hong Kong et un retour ici l'année prochaine."

Si Smoking Sun (Smart Strike) se montre assez tardif, le vainqueur Dan Excel, robuste combattant de 6 ans, était déjà trèsprécoce en Irlande, où il a gagné 2 groupes en début de carrière sous le nom de Dunboyne Express. Ce fils de Shamardal né dans la pourpe puisque neveu de Love Divine (Oaks d'Epsom) et donc cousin de Sixties Icon (St Leger) a même enlevé les fameux Anglesey Stakes (Gr.3 - 1200 m - Curragh), le 1e groupe pour 2 ans du programme irlandais en juillet. Il a confirmé avec une victoire à 3 ans dans un 2000 guinées Trial. Juste en dessous de l'élite, il a quitté l'Irlande après une 4e place dans les Irish Champion Stakes. Son titre de gloire en Asie était jusque là son succès dans le Champion Mile, un Gr.1 international au printemps 2013. Son entraineur John moore sait bien faire vieillir ses chevaux. " Singapour pour moi, c'est une terrain de jeu de ma jeunesse. J'ai vécu ici quand j'étais gamin. J'y ai monté en gentleman rider. Et revenir gagner encore une fois, faire aussi bien que l'an dernier, c'est le rêve de tout entraineur. Il pourrait sans doute revenir courir en Europe. Je dois voir avec ses propriétaires pour une option à Goodwood." Dan Excel est auréolé d'un tout nouveau record de vitesse, 1'59'07, sachant que bien peu de chevaux dans le monde ont été capables de descendre sous la barre symboliques des 2 min sur 2000 m.

 

Tommy Berry arbore fièrement le drapeau hongkongais après son succès en selle sur Dan Excel.

 

L'entraineur John Moore se voit remettre le coupe du vainqueur par le Président de Singapour.

Voir aussi...