L'histoire de DNA Pedigree: Mill Reef, l'épervier anglais

04/03/2020 - Grand Destin
Grand féru de voyages et toujours en quête de nouvelles aventures, Thierry Grandsir (DNA Pedigree) affronte vents et marées cette semaine pour rejoindre les côtes anglaises, afin de vous conter l'histoire de l'épervier anglais, Mill Reef, formidable champion dont la classe et la popularité ont laissé une empreinte indélébile dans la mémoire de tous les amoureux des courses. 

 

Mill Reef (1968-1986), par Never Bend et Milan Mill (Princequillo)
 
 
Si vous avez la chance de visiter le National Stud à Newmarket (GB), vous passerez inévitablement devant une stèle surplombée d’une statue commémorant la mémoire de l’un des plus grands Champions de tous les temps : Mill Reef. Votre guide, la voie empreinte d’une émotion à peine contenue, vous contera les exploits de ce cheval hors normes dont la popularité n’eut d’égal que la classe immense qui le caractérisait.
 

 
Fruit du nick classique Nasrullah x Princequillo à l’instar de Secrétariat et de Riverman, Mill Reef naquit le 23 février 1968 aux USA des œuvres du précoce et talentueux Never Bend dont la carrière fut contrariée par une fragilité peu compatible avec les méthodes d’entraînement américaines, et de la jument Milan Mill qui ne courut qu’une seule fois. C’est pourquoi Paul Mellon, éleveur-propriétaire d’un Mill Reef dont les paturons long-jointés suggéraient une probable inadapation au dirt, décida d’envoyer son élève en Angleterre pour le confier aux bons soins de l’entraîneur Ian Balding.
 
Bien lui en a pris, car Mill Reef montra très vite beaucoup de qualités, avec une singulière particularité : il ne laissait aucune trace derrière lui sur la piste, même après un galop en terrain lourd. Comme le déclara alors Ian Balding : « C’est comme si un fantôme avait galopé à sa place ! »…
 
Gloire du matin, Mill Reef attira sur lui tous les regards dès ses débuts en compétition, une victoire facile en mai de ses 2 ans acquise de bout en bout et par quatre longueurs à Salisbury. Geoff Lewis, qui sera son fidèle partenaire durant toute sa carrière, déclara à sa descente de cheval : « C’est le meilleur que tu n’as jamais eu Ian, et que tu n’auras jamais ! ».
 
La suite lui donna raison, avec un succès acquis par huit longueurs dans les Coventry St. (Gr.3) le mois suivant à Royal Ascot. Direction la France, pour un Prix Robert Papin qui était alors le premier Gr.1 européen réservé aux 2 ans mais où l’attendait un monstre, My Swallow. De taille fort réduite, Mill Reef faisait figure de poney aux côtés du géant : il lui concédera une courte tête au poteau, amère défaite que l’on attribuera à un voyage prolongé durant lequel il n’eut pas même de quoi s’alimenter…
 
De retour sur ses terres, Mill Reef effacera ce mauvais souvenir en remportant trois courses d’affilée dont les Dewhurst St. (Gr.1) par quatre longueurs en fin de saison. Auteur d’une rentrée victorieuse dans les Greenham St. (Gr.3) au printemps de ses 3 ans, il tomba sur un os dans les 2000 Guineas St. (Gr.1), et dut se contenter de finir dans le sillage de l’invincible Brigadier Gérard tout en savourant sa revanche sur My Swallow. Il ne connut plus la défaite ensuite, avec six victoires consécutives dans des courses de Gr.1 : un record européen qui tiendra plus de trente ans, jusqu’à Rock of Gibraltar en 2002 !
 
 
 
Mill Reef, vainqueur du Derby d’Epsom édition 1971
 
 
Gagnant désinvolte du Derby (Gr.1), des Eclipse St. (Gr.1) et des King George VI & Queen Elizabeth St. (Gr.1 – par six longueurs), Mill Reef se devait de remporter le Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1). Et pour mettre cette fois toutes les chances de son côté, un avion de l’US Air Force fut spécialement afrêté pour lui, avec repos à Lamorlaye à l’arrivée !
 
Le résultat fut net et sans appel : victoire en temps record trois longueurs devant Pistol Packer… Couronné Cheval de l’Année en Europe, Mill Reef joua les prolongations à 4 ans pour remporter le Prix Ganay (Gr.1) par dix longueurs puis la Coronation Cup (Gr.1) à Epsom, malgré une rhinopneumonie qui le mit quelque temps sur la touche. 
 
De nouveau opérationnel en fin d’été, l’ambition de Mill Reef était de réaliser le doublé dans l’Arc mais, le matin même de la course, il s’accidenta gravement lors d’un galop : rapatrié en urgence à Kingsclere Stables, il subit une opération chirugicale qui dura sept heures et qui nécessita la pose d’une prothèse. Mill Reef doit à ses médecins (dont Jim Roberts) ainsi qu’à son excellent tempérament d’avoir survécu.
 
 
 
Mill Reef, à la sortie d’une opération chirugicale de 7 heures…
 
 
Ménagé à son entrée au National Stud (seulement vingt-trois juments en première saison), il deviendra étalon tête de liste des pères de gagnants à deux reprises en GB, et produira 62 gagnants de Stakes sur 379 foals (16,4% de sa production totale) dont 17 vainqueurs au plus haut niveau. On lui doit les gagnants de Derby Shirley Heights et Reference Point, et une lignée mâle relayée par Darshaan et Dalakhani
 
Le legs de ce cheval à la capacité d’accélération fulgurante possédant à la fois précocité, vitesse, tenue et aptitude à tous les terrains est toujours vivace, les trois derniers vainqueurs du Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1) et les pères de sauteurs classiques Kapgarde et Martaline en attestent !
 
 

Voir aussi...