Mid Dancer n'a pas gagné, mais il n'a pas flanché

19/05/2013 - Actualités
" Pas de tristesse au retour de ce Grand Steeple Chase de Paris. Pas de larmes, ni de cœurs serrés. Au contraire. Une lueur, une clarté aveuglante transperçant les nuages qui se voulaient pourtant bien dramatiques aujourd'hui. Qu'il était beau notre Mid Dancer ! Par "And They're off", alias Allisson Nicolleau, sur Facebook.

" Qu'il était harmonieusement rond, notre légende ! Brillante, notre icône ! Doux, notre emblème !
Si calme, si serein dans le rond de présentation. Si impatient au défilé. Si inquiétant dans le parcours. Mid, le Dieu Mid, insatiable cheval de course, n'a, encore une fois, pas fait dans la dentelle. N'attendez pas de lui un regard rassurant ! Il n'en a que faire de vos cœurs bondissants. Ne le jugez pas comme un papi ! Il vous lancerait un regard de défi. Mid Dancer est un seigneur. Le roi d'Auteuil. Le Monarque du Grand Steeple. Douter de lui, c'est douter de tout. Et ne plus avoir de repères. Et pourtant, je l'avoue, mes lèvres ont souffert. Mon cœur a explosé. Mes yeux se sont exorbités. J'étais immobile, statufiée face au poteau. Pourtant si expressive, si torturée. C'est pas qu'il a mal sauté, le grand Mid, c'est qu'il se tordait dans ses sauts, se réceptionnant de travers sur les quelques difficultés dérisoires, bondissant avec soin au travers des épreuves les plus notables. Je l'ai vu avancer, reculer, apparaître, s'estomper, jaillir et dépérir. Un bond dans le temps, un net retour de cadran, et un scénario identique. Mid n'avait plus d'action au second saut des tribunes. Mid respirait au fond de l'hippodrome. Mid se déclarait dans l'ultime tournant de sa vie. Intact. Courageux ? Simplement lui-même.

 

Mid Dancer au rond de présentation (photo "And They're Off" -- Facebook)


Évidemment, tout n'est pas gorgé de rose, de soleil et de bonheur sucré ! Car Mid n'a pas gagné. Mais il n'a pas flanché.
Alors qu'il prononçait son effort dans la courbe, contournant ses challengers pris en respect, il constatait déjà au loin la relève s'estomper dans une lutte sans merci. Et il n'en avait que faire. Il n'avait pas le temps. Il n'avait pas la force, ni la vitesse. Lui restait la résistance.


Mid passait le poteau en tête des battus, l'allure modérée. Je l'entendais plaisanter avec Sylvain, lui adressant un discret mais provocateur : " Tu crois quand même pas que je me serais cassé le cul pour poser avec une casaque aussi laide !" Et ils riaient, ils riaient ! De vrais copains ces deux-là !


Mid passait devant moi. Je lançais l'ovation qui se faisait tant désirée. Ce qu'ils pouvaient être froid, ces spectateurs ! Quand il s'agit du direct, de la lutte et des enjeux tatoués sur un ticket, là il y a du monde pour crier. Mais quand on parle de rendre hommage à un seigneur se retirant sur une prouesse, il n'y a plus personne. Honteux peut-être d'admirer un cheval.

 

Mid Dancer, en casaque blanche et rouge portée par Sylvain Dehez, a toujours la rage au ventre. Il domine ici Kotkieglote et conclut remarquable 3e de ce Grand Steeple 2013.


Je n'ai pas boudé mon plaisir !


J'ai vu la star partir dans la profondeur des écuries. Sans regard, sans bruit. Calme, discret, anonyme.
La légende s'estompant au loin, je repensais à l'arrivée. A cette lutte intensive. Et pour le coup, à ces cœurs si serrés !
L'émotion était des plus palpable dans le rond de présentation.


Ce n'est pas M. Papot, accourant vers son crack Bel La Vie et tentant de s'attribuer en l'instant la gloire totale de celui qui avait transpiré sur les 5800 m du parcours qui m'émeut. Bien au contraire. C'est le courage du jeune cheval de sept ans, doué depuis si longtemps, et présent aujourd'hui pour rendre hommage à son véritable ami. Il s'était arraché sur les derniers mètres. Avec rage. Décrochant au poteau son étoile qui lui était attribuée depuis longtemps. Celle de Pascal Hervé.


A quelques mètres de lui, Shannon Rock disparaissait dans son ombre. Éternel deuxième, éternel frustré. Et pourtant il avait tout donné. Motivé dans son cœur, motivé dans l'esprit... Désespéré par la douleur poignante qu'il ressentait à l'épaule. Car sa victoire devait se faire en binôme ! Et ce n'est pas qu'il manqua de soutien de la part de David, bien au contraire, c'est qu'il absorba sa clavicule déchirante et sa dépression criante. Meurtris par tant de tristesse, de désespoir, il s'effondrait à son tour.

D'un pas trainant et léger, Polar Rochelais, l’ankylosaure, récupérait à l'ombre des arbres. L'encolure des plus basse, il n'était pas déçu. Mais la course, et la chute, furent pour lui une épreuve et il demandait à souffler. Patiemment, sa jeune lad aux cheveux bouclés le faisait marcher aux écuries, puis lui permis l'accès à la délicieuse pelouse et à un abreuvage tant mérité. Elle avait cependant le visage crispé, tendu.
Elle n'aurait pas supporté de le voir partir sur un saut.
Elle ressentait encore la peur.
Et l'adrénaline.

C'est ça un Grand Steeple. »

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