Fabrice Véron, sa période bleue

06/09/2013 - Actualités
Cravache d’Or de l’Ouest à quatre reprises, le natif d’Angers ne se contente pas de collectionner les victoires acquises sur les honorables hippodromes provinciaux. Fort de la confiance de Henri-Alex Pantall, son patron, le bientôt trentenaire glane en effet de nombreux groupes depuis le début des années 10 (particulièrement en Allemagne) et devrait prendre part à son premier Championnat du Monde des pur-sang début octobre. Rencontre.
« Je ne savais même pas balayer la cour »
 
« Apprenti, je n’étais pas très bon. » indiquait Fabrice Véron à son interlocuteur lors d’une interview parue sur le site d l’Association des Jockeys. Lorsque l’on évoque devant lui son propre commentaire, le lauréat du récent Grand Prix de Deauville ne peut s’empêcher de sourire : « C’est vrai, au tout début, j’avais tendance à me laisser embarquer par mes partenaires à l’entraînement. On me demandait de faire un tour de piste avec un cheval, j’en faisais deux. Pour être honnête, je ne savais même pas balayer la cour. »  Adepte de l’auto-dérision (l’humour des forts), Fabrice Véron avait, il faut l’avouer, quelques circonstances atténuantes. N’ayant découvert les chevaux que sur le tard, le petit gars du « 4-9 » a eu besoin d’un peu de temps pour se familiariser avec les pur-sang : « Mon père est ouvrier et ma mère ambulancière. Je n’étais pas vraiment prédestiné à devenir jockey. J’ai découvert les chevaux chez Gérard Margogne avant d’entrer à la maison familiale de Pouancé. A l’origine de cette vocation, je m’étais rendu à la foire-exposition d’Angers avec ma mère. Il y avait un forum des métiers et ce que j’ai vu de Pouancé et de l’univers du cheval m’a emballé. Tout est un peu parti de là.»
 
 
Fabrice Véron tout sourire après sa belle victoire dans le Grand-Prix de Deauville 2013. Prochaine étape, le Prix de l'Arc de Triomphe avec son partenaire Très Blue. (Photos APRH)
 
 
Wild Wild Ouest
Formé par Gérard Margogne, chez qui il est resté quatre ans, Fabrice Véron n’a que des mots gentils pour les hommes qui l’ont façonné : « Chez Gérard Margogne, j’ai pu évoluer dans une cadre très familial. Monsieur Margogne était strict, parlait peu mais allait à l’essentiel. Il savait éventuellement vous botter le derrière si besoin. C’était un peu l’ancienne école…une très bonne école. J’ai ensuite collaboré avec son gendre, Joël Boisnard, avant de travailler avec monsieur Guillochon, un homme très habile. » 
 
 
Gérard Margogne a été le premier employeur de Fabrice Véron
 
 
Fabien Lefebvre et Mathieu Androuin quittant la maison Pantall, Fabrice Véron offre ses services à l’André Fabre de l’Ouest. Mode opératoire : « C’est très simple. Je l’ai contacté au téléphone et nous avons convenu de nous rencontrer sur l’hippodrome d’Eventard.  Johan Victoire était alors son premier jockey « parisien », Goulven Toupel l’était pour l’Ouest. Il y avait aussi David Michaux et Sébastien Castellier.» Pas encore « galactique » à cette époque, le futur partenaire de Très Blue trace petit à petit son sillon. Il poursuit sa progression et conquiert au bout de quelques temps sa première Cravache d’Or de l’Ouest : « Goulven avait auparavant brillé à plusieurs reprises dans ce challenge. J’étais fier de mes deux premières Cravaches de l’Ouest. J’en ai eu deux autres depuis. C’est un titre très important à mes yeux. Je crois que ces quatres Cravaches consacrent aussi la réussite de l’entreprise de Henri-Alex Pantall. Le jockey, c’est un peu l’avant-centre de l’équipe, celui qui doit transformer en but le travail fourni par les autres en amont.»  
 
 
Quid d’H.A.P ?
 
On essaie d’imaginer la relation Pantall-Véron, on spécule devant notre interlocuteur. Le pilote-maison dîne-t-il tous les soirs chez son patron ? A quoi peut bien ressembler une after Grand-Prix de Deauville 2013 ? : « En fait notre relation est très simple, très professionnelle. Une relation de patron-employé tout ce qu’il y a d’ordinaire. A vrai dire, cela me va très bien ainsi. J’aime bien cette petite distance. C’est une personne que je respecte énormément. J’admire sa très grande capacité de travail.»  « FV » n’ira pas beaucoup plus loin dans l’emploi des superlatifs à l’endroit de son patron. Pudeur ? Certainement. Sur ce plan, notre interlocuteur nous livrera plus tard un indice. Lorsqu’on lui demandera le nom du jockey qu’il admire le plus, le trentenaire répondra sans hésiter : « Thierry Jarnet. Il est terriblement efficace en piste, mais discret et simple dans le vestiaire. C’est un modèle pour les jeunes. A bien des égards. » Le genre « qui n’en fait pas des caisses » plaît visiblement à notre homme.
 
 
Le patron, c'est lui : Henri-Alex Pantall
 
 
Véron se prononce Vérone en allemand
 
Considéré au milieu des années zéro comme un excellent jockey provincial (expression reductrice, s’il en est), ce bosseur impénitent change de statut à l’amorce des années 10. Alors que les traditionnels pilotes de la phallange parisienne d’HAP sont retenus en France, en particulier le dimanche, Fabrice Véron saisit l’opportunité de monter de belles courses en Allemagne. Outre-Rhin, il se constitue un joli palmarès (voir ses victoires de Groupe, ci-dessous) :  « C’est vrai, le déclic a sans doute lieu à partir de là. Au début, mon nom se prononçait Vérone en Allemagne. Ils ne me connaissaient pas, c’est normal. Je me suis fait une belle carte de visite là-bas. » Logiquement, ses conquêtes germaniques marquent les esprits. Ses crochets allemands lui offrent une nouvelle notoriété. Fabrice Véron est désormais de plus en plus sollicité à Paris et, opportuniste en diable, rentre rarement bredouille de ses raids dans les différents temples du plat. Très Blue lui a cette année permis d’étoffer son palmarès, d’enlever ses premiers tournois majeurs en France. Et l’Arc se profile désormais pour le tandem formé par Henri-Alex Pantall.
 
 
L’Arc détendu
 
La perspective d’une première participation au Championnat du Monde des pur-sang ne semble pas effrayer l’angevin. Lequel utilise la méthode Coué : « A vrai dire, je n’y songerai que lorsque je verrai mon nom dans la colonne « jockeys » à côté du cheval au moment des partants. Pas avant. D’ici là, d’autres échéances m’attendent. » 
 
 
Qui se ressemble, s’assemble (bien)
 
Au sujet de Très Blue, notre jockey est intarissable. D’abord, Fabrice Véron a eu l’occasion de piloter certains éléments de sa famille, en particulier sa propre soeur, Très Rapide, avec laquelle il a gagné : « Très Rapide était plus élancée. D’un modèle plus petit, Très Blue est aussi plus râblé. C’est un lutteur. Il se bonifie avec le temps. C’est un peu le genre Cirrus des Aigles. » Lorsqu’on lui fait remarquer que c’est aussi le genre Fabrice Véron, le jeune papa éclate de rire : « C’est bien possible. Il est vrai que l’on a quelques points communs. » 
 
 
   Après la victoire de Très Blue dans le Grand-Prix de Deauville, Fabrice Véron n'oublie surtout pas de saluer et d'embrasser son petit champion
 
 
Ulysse n’oublie pas sa Pénélope
 
Bien installé dans le Top 5 des jockeys français, Fabrice Véron est en course pour l’octroi de la Cravache de Bronze, mais avoue ne pas y penser (« pour l’instant… » ). Ses objectifs sont ailleurs.
Le temps précieux de notre interlocuteur est compté. Aujourd’hui, Fabrice Véron bénéficie de l’un de ses rares jours de congés. A-t’on oublié quelqu’un, Fabrice ? : « Je voudrais remercier les propriétaires qui me font confiance, dont Horst Rapp (NDLR : propriétaire de Très Blue). Aussi, j’ai une pensée pour ma famille. Ma femme ne me voit parfois que deux jours par mois. Ce n’est pas évident pour elle aussi », nous répondra l’Ulysse de l’Ouest.  
 
Fabrice Véron, en chiffres et en bref
 
Né le 22 septembre 1983
Année
Au classement des jockeys
Nb de victoires
2013*
4e
72
2012
4e
103
2011
5e
108
2010
7e
87
2009
12e
71
2008
19e
45
2007
44e
26
2006
28e
35
2005
36e
27
2004
19e
41
2003
24e
33
 
699 victoires au total (France et étranger)
*Statistiques arrêtées au dimanche 2 septembre 2013
4 Cravaches d’Or de l’Ouest 
 
Ses victoires de Groupe
Année
Hippodrome
Course
Chevaux
2013
Deauville
GP de Deauville (Gr. 2)
TRES BLUE
2013
Deauville
Prix du Reux (Gr. 3)
TRES BLUE
2013
Cologne
German 2000 Guineas (Gr. 2)
PEACE AT LAST
2013
Cologne
Karin Baronin von Ullmann-Schwarzgold-Rennen (Gr. 3)
BEATRICE
2012
Baden-Baden
Baden Racing Stuten-Preis (Gr. 3)
PAGERA
2011
Hambourg
Hamburger Stuten-Preis (Gr. 3)
KARSABRUNI
2010
Baden-Baden
Golden Peitsche (Gr. 2)
AMICO FRITZ
2010
Berlin-Hoppegarten
Benazet Rennen (Gr. 3)
AMICO FRITZ
 
 
 
Ici avec Pagera dans le Stuten Preis 2012 (Gr. 3), Fabrice Véron connait les courses allemandes sur le bout des doigts
 
 
Son meilleur classement dans un Gr. 1 : 2e du Derby Allemand (avec Très Blue).

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