Nouvelle-ZĂ©lande : la course aux Karaka Millions

31/01/2019 - DĂ©couvertes
Cas unique en son genre, la plus grande réunion de course de Nouvelle-Zélande n'est pas celle du Derby ou de l'Arc local mais plutôt celle des Karaka Millions, deux épreuves richissimes réservées aux chevaux sortis des ventes de yearlings du même nom, qui débutent le lendemain d'une immense journée de fête sur l'hippodrome d'Ellerslie à Auckland.

 Comme dans tout pays de courses qui se respecte, le grande journée de sport hippique en Nouvelle-Zélande se déroule dans une ambiance de fête débridée, avec une population de 10.000 personnes chauffée à blanc par les bières gratuites. Belles toilettes et costumes tirant sur le déguisement occupent tout l'espace du principal hippodrome du pays, celui d'Ellerslie à Auckland, la capitale économique d'un pays totalement atypique. Aux antipodes, éloignée de tout, la Nouvelle-Zélande est une contrée de légendes pour ses paysages, ayant notamment servi de décor au tournage de la trilogie du Seigneur des Anneaux. Vaste, grandiose mais très peu peuplée avec à peine plus de 4 millions d'habitants, la Nouvelle-Zélande reste un pays très agricole, célèbre pour ses élevages de moutons et de bovins pour la production d'une viande d'une qualité exceptionnelle, est très attachée à la culture des courses. On trouve de nombreux hippodromes à travers les campagnes, pour le plat, mais aussi l'obstace et même le trot.

 

 

Au contraire de l'Australie, la grande soeur, entièrement focalisée sur la vitesse, l'élevage néo-zélandais est essentiellement reconnu pour ses chevaux classiques de plus de 2000 m. Néanmois, comme elles s'adressent à des chevaux issus des ventes de pur-sang, les 2 courses principales de la Karaka Million se disputent sur 1200 m pour les 2 ans et 1600 m pour les 3 ans (NDLR : rappelons que c'est actuellement l'été dans l'hémisphère sud où la saison de monte s'étend d'août à novembre). Et pour une fois, la course des 2 ans tient le haut de la corde, tant la génération de 2 ans est annoncée comme exceptionnelle actuellement.

Mais surtout, comme son nom l'indique, la Karaka Million est riche, et même très riche ! Car tandis que son élevage est réputé partout dans le monde, son système de course est assez pauvre avec un niveau d'allocation faible. or, les 2 courses proposent chacune un million de dollars néo-zélandais (soit 600.000 € dont plus de la moitié au vainqueur), ce qui en font les 2 épreuves les mieux dotées de l'année, et de loin. Notons que la réunion de gala ne comporte que 6 courses et se déroule en semi-nocturne. La Nouvelle-Zélande organise de plus en plus d'événements de la sorte car ils sont très populaires. Le public a le temps de venir en 2ème partie de journée et d'entamer, juste après la dernière course qui se dispute à 20H00, une énorme bringue sur place avec groupe de rock, DJ, feux d'artifices, bars pleins à craquer et queue de taxis salvatrices pour ramener une population adepte des "lâcher de nerfs..."

 

 

Déjà auréolé sur titre officieux de meilleur complexe de vente au monde, l'agence New Zealand Bloodstock met les petits plats dans les grands pour plaire à ses clients, tant vendeurs qu'acheteurs. Ainsi, le Karaka Million se déroule à partir de 15H00 le dernier samedi de janvier, c'est à dire la veille de l'ouvertue de la grande vente de yearlings annuelle qui s'étend sur 6 jours avec plus de 1000 chevaux au catalogue. Au moment des courses, le complexe ferme et tout le personnel est invité sur l'hippodrome. Les vendeurs locaux, et les acheteurs se retrouvent donc tous ensemble parmi la foule pour participer à une superbe fête des courses qui met forcément de bonne humeur ! Dans ce contexte, nonobstant la qualité des animaux eux-même, on comprend mieux que la Nouvelle-Zélande attire de plus en plus d'acheteurs étrangers. En plus des australiens, qui font ici leur marché depuis des lustres, la semaine de Karaka fait venir ainsi des gens de toute l'Asie (Japon, Hong Kong, Singapour, Malaisie), mais aussi d'Europe, avec des anglais, des français et les incontournables irlandais de Coolmore.

 

 

Le clan des Magnier verra d'ailleurs briller sa casaque bleue foncée dans le Karaka Million des 3 ans, grâce à Long Leaf. Ce fils de Fastnet Rock avec une mère par Stravinsky avait été payé la forte somme de 750.000 NZ$ (soit 450.000 €) par Coolmore en association avec Sir Peter Vela, un milliardaire néo-zélandais qui a fait fortune dans la pêche de poissons dans les grands fonds, propriétaire par ailleurs du complexe de vente, et vainqueur du Prix Guillaume d'Ornano (Gr.2) à Deauville en 2017 avec Eminent (Frankel). Double gagnant de Listed, et multiple placé de Groupe à 3 ans, Long Leaf est entraîné en Australie par David Hayes, l'un des plus grands entraîneurs du monde à la tête de plus de 600 chevaux avec deux associés, son fils Ben Hayes et son neveu Tom Daberning. Il a offert une immense joie à son jockey néo-zélandais James MCDonald pour son retour dans son pays natal. Parti faire fortune en Australie où ce jeune jockey vedette était devenu le 1er jockey de l'écurie Godolphin, McDonald y avait subi une lourde mise à pied de 18 mois pour avoir joué l'un de ses partenaires (qui avait pourtant gagné !).

 


Long Leaf, lauréat du Karaka Million pour les 3 ans
 

 Si le public a offert une très belle ovation à James McDonald, elle a gratifié d'un triomphe Opie Bossom lorsque celui-ci est revenu de son succès dans la Karaka Million des 2 ans en selle sur la pouliche Probabeel, qui a offert un succès complet à l'industrie des courses néo-zélandaises sur ses terres. Fille de Savabeel, le meilleur étalon du pays installé à Waikato Stud, chez Mark Chittick qui est aussi éleveur de la pouliche, Probabeel était la pouliche achetée le plus cher du lot des 16 partants, puisqu'elle avait été payée 380.000 NZ$, soit 216.000 €, par le flambloyant propriétaire Brendan Lindsday. Ce multimilliardaire a créé et récemment vendu son entreprise Sistema, énorme multinationale de fabrication de récipients en plastique de type tupperware à clipser, que tous les foyers du monde moderne ont dans leur cuisine ! Lui qui possède également des chevaux chez Nicolas Clément et Joséphine Soudan en France, Brendan Lindsay a acheté l'an dernier Cambridge Stud, le haras qui venait d'aligner 32 titres conséctifs de meilleur vendeur à la vente de Karaka, avec tout son effectif de chevaux (85 poulinières). C'est aussi lui qui a importé Almanzor pour sa 1ère saison de monte dans l'hémisphère sud, l'automne dernier. Lauréate de la course préparatoire, Probabeel aurait été favorite si elle n'avait pas hérité d'un très difficile n°16 ans les stalles. Mais elle était tellement au-dessus du lot que son jockey s'est permis de la monter seulement pour elle. Partie mollement, elle s'est rapprochée à la sortie du tournant et s'est imposée avec une grande aisance pour offrir son 1er succès dans cette épreuve à son propriétaire pour sa 1ère participation, et aussi un succès complet à son entraîneur. Installé sur le centre d'entraînement de Mata Mata, au centre du pays, Jamie Richards signe en effet le trio vainqueur ! 

Notes :

Notre série de reportages vous emmènera à la découverte de Cambridge Stud et à la rencontre de Jamie Richards.

 


L'entraineur Jamie Richards avec son jockey Opie Bossom


Probabeel avant la course


Promenade de santé pour Probabeel


Brendan Lindsay avec sa femme Joe


Mark Chittick, éleveur de Probabeel à Waikato Stud.

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