Explosion des coûts de production et effet pervers du "sire power" : il faut stopper la machine à tuer les éleveurs

Anodin, le mieux classé des étalons avec ses résultats dans l'hémisphère nord, pami ceux fonctionnant actuellement en France à 5000 € maximum.
En plus des mouvements sociétaux comme l'agonie du maillage agricole français, les coûts de production en plat mais encore plus aujourd'hui en obstacle ont tellement explosé qu'ils ont fait fuir d'innombrables éleveurs depuis plusieurs années, et empêchent toute nouvelle vocation. Tout le monde peut constater le grisonnement des chevelures à toutes les assemblées d'éleveurs, de plus en plus clairsemées par ailleurs. Le nombre de chevaux nés et élevés en France reste pour l'instant stable, certes, mais les trous ne sont compensés aujourd'hui que par les investisseurs étrangers attirés par le généreux système de primes, et qui font naître dans l'hexagone.

Charm Spirit, le meilleur rapport qualité prix en ajoutant sa production dans l'hémisphère sud.
Un tel phénomène a plusieurs raisons, mais la plus spectaculaire d'entre elles est évidemment l'explosion des coûts généraux pour produire puis exploiter un cheval de courses, notamment via l'inflation galopante des tarifs de prix de saillie et la concentration des juments sur une poignée d'étalons, suivant les modes. Cela conduit une double barrière qui ne laisse de place qu'à un niveau d'acteurs d'élite, quand les autres n'y trouvent plus leur place et sont déconsidérés.

Cloth of Stars a perdus sa cote commerciale mais produit des gagnants en série !
Et il est intéressant de constater que ce brutal revers de la médaille de l'amélioration du marché depuis 20 ans est encore plus cruel en obstacle qu'en plat, alors que l'obstacle était depuis toujours la discipline la plus accessible. En effet, l'univers du plat est par nature plus vaste car techniquement plus accessible, répandu partout dans le monde y compris dans des endroits les plus improbables... et donc importateurs. La clientèle est hétéroclite, disparate et joyeusement incohérente, avec un nombre si important de catégories et de niveaux en France et ailleurs que tout le monde semble pouvoir y trouver son compte, selon ses goûts et ses moyens, tout en gardant un petit espoir d'améliorer son quotidien en touchant un jour un vrai bon cheval. Et surtout, les chevaux peuvent courir assez souvent pour entretenir les perspectives d'un lendemain qui chante... pas trop lointain.

Hunter's Light, l'ami des éleveurs.
L'histoire est devenue différente en obstacle, dont les perspectives majeures sont concentrées en France, en Angleterre et en Irlande, plus quelques acteurs aux Etats-Unis, en République Tchèque et Italie. Or, il ne faut pas se voiler la face. Même si les allocations françaises sont extrêmement généreuses, c'est l'Angleterre qui finance tout le système commercial européen depuis des lustres. Historiquement, les irlandais sont des pinhookers qui élèvent ou achètent le moins cher possible pour revendre le plus cher possible "green jackets", c'est à dire anglais. La crise profonde de l'Angleterre, notamment dûe aux conséquences du Brexit, ont ruiné une bonne partie de clientèle anglaise. Et même si de vrais clients irlandais fortunés sont arrivés dans la Verte Erin, il est évident qu'un pays de 5 millions d'habitants, même habité d'une passion viscérale du cheval, ne peut pas compenser la clientèle perdue d'un autre pays de 80 millions d'habitants.

Gutaifan au Haras des Faunes
Or, aujourd'hui, tout tourne en France autour de la valeur commerciale du poulain d'obstacle qu'on produit... alors qu'il n'y a plus de client pour les acheter. En effet, la clientèle fiscalement française est extrêmement maigre, et ne risque pas d'augmenter malgré les efforts extraordinaires de prospection d'une nouvelle génération d'entraineurs, tant la casse est devenue importante avant même d'aller aux courses... très hypothétiquement. Pourquoi dépenser des fortunes pour avoir des chevaux de courses s'ils ne courent presque jamais ?

Lawman au Haras du Mazet
Dans ce contexte, le monde de l'obstacle était justement celui où, protégé d'un marché trop agressif, avec des coûts de production assez bas et des prix de saillie raisonnables, permettait à de très nombreux éleveurs amateurs de tenter leur chance pour avoir tout simplement le plaisir inouie de gagner une course sur son hippodrome régional préféré. Aujourd'hui, le même éleveur est totalement déconsidéré s'il ne va pas à un étalon cher et s'il n'a pas gagné de black type à Auteuil. Bref, l'obstacle penche dangereusement vers un entre-soi dont l'issue est nécessairement fatale. Très paradoxelement, l'élevage français quitte l'esprit de variété qui a fait son succès international, et s'enferme dans les travers du "sire power" assez largement responsables de l'écroulement sportif spectaculaire de l'élevage d'obstacle en Irlande. Même de nombreux acteurs et observateurs britanniques soulignent cet état de fait.

Birchwood au Haras de la Huderie.
Il faut donc retrouver des rêves accessibles. Et prendre grande garde aux bulles spéculatives. Car le rêve, consubstentiel à notre monde d'illuminés en liberté (dont nous sommes tous membres !), ne tient pas longtemps quand il passe à l'état de fantasme trop éloigné de quelques réalités. Ces plaisirs si doux à goûter de temps à autre, pour alimenter la machine à fabriquer des grains de folie !

Sommerabend au Haras de la Baie.
Voici pourquoi nous faisons ici un plaidoyer pour les étalons abordables et efficaces, en tout cas parmi ceux ayant une production à courir. Loin de nous l'idée de déconseiller à quiconque d'utliser les services des étalons plus chers évidemment, car le sport exige une élite et une totale liberté de choix indivduels. Mais il faut dire et répéter aux éleveurs, aux propriétaires, aux courtiers, aux entraineurs, aux agences de ventes et à tous ceux qui nourissent et se nourrissent du système des courses, que notre pyramide s'appuie sur des gens qui n'ont d'autres ambitions que de passer de temps en temps le poteau en tête, et pas seulement dans la grande capitale. Si la base continue de se déliter sous le colosse de la France hippique, celui-ci s'écroulera vite sur ses pieds devenus d'argile.
| CLASSEMENT 2024 parmi les 50 premiers | ETALONS stationnés en France en 2025 | VICT. (dont HEMISPHERE SUD) | PRODUITS INVDIDUELS | SAILLIE Maximum 5000 € |
| 3e | Charm Spirit | 158 (70) | 105 | 4.000€ |
| 8e | Anodin | 108 | 63 | 5.000€ |
| 11e | Cloth Of Stars | 91 (2) | 60 | 4.000€ |
| 12e | Hunter's Light | 88 | 47 | 3.500€ |
| 21e | Gutaifan | 72 | 42 | 2.500€ |
| 23e | Olympic Glory | 69 (14) | 49 | NC |
| 24e | Lawman | 67 | 45 | 4.000€ |
| 26e | Born To Sea | 60 | 45 | 3.500€ |
| 27e | Birchwood | 59 | 35 | 3.500€ |
| 28e | Sommerabend | 54 | 31 | 3.500€ |
| 30e | It'S Gino | 53 | 32 | 3.800€ |
| 31e | Recoletos | 52 | 28 | 4.000€ |
| 33e | Penny'S Picnic | 50 | 30 | NC |
| 34e | Castle Du Berlais | 48 | 29 | 5.000€ |
| Clovis Du Berlais | 48 | 29 | 3.000€ | |
| Motivator | 48 (5) | 25 | 5.000€ | |
| 37e | Beaumec De Houelle | 47 | 30 | 5.000€ |
| 38e | Complacent | 46 (43) | 26 | 2.000€ |
| 39e | Spanish Moon | 41 | 29 | 5.000€ |
| Seabhac | 41 | 25 | 4.000€ | |
| 41e | Prince Gibraltar | 40 | 26 | 4.500€ |
| 42e | Montmartre | 39 | 22 | 3.700€ |
| 43e | Frisson Du Pecos | 37 | 25 | 1.300€ |
| 45e | Morandi | 36 (2) | 23 | 2.500€ |
| Shamalgan | 36 | 19 | 2.000€ | |
| 48e | Flintshire | 35 | 27 | 4.000€ |
| Tai Chi | 35 | 23 | 2.500€ |

