Régis Barbedette, une vie au galop

03/04/2019 - Actualités
Vous le connaissez tous pour sa bonne humeur, et pour l'avoir vu à la tête de certains des plus grands champions du galop. A 60 ans, Régis Barbedette a décidé de prendre sa retraite après une riche carrière. Il nous a confié ses plus beaux moments, de quoi faire rêver tout un public qui aime les courses, et montrer la beauté de notre métier. 

 

Régis Barbedette, une vie entière sur les hippodromes (photos Jacques Yesse)

 

Régis Barbedette, ce nom n'apparaît ni dans la liste des entraîneurs, ni dans celle des jockeys, et il est pourtant une personnalité bien connue dans la planète course. C'est lui que vous voyez à la tête des champions de Freddy Head depuis 22 ans, et qui a été de tous leurs voyages, victorieux ou non. Toute belle histoire à une fin, et cette fois, elle est heureuse. A 60 ans, Régis prend sa retraite, et laisse sa place de garçon de voyage à Sébastien Lagrange, qu'il a formé depuis plus de 10 ans pour assumer la suite comme il se doit : "Quand il est arrivé apprenti, j'ai dit à sa mère qu'il ne pourrait pas être jockey à cause de sa taille, et qu'il devrait apprendre le métier de garçon de voyage ! Je laisse l'écurie entre de bonnes mains."

Sébastien Lagrange assurera la relève à l'écurie Freddy Head ! (APRH)

 

Régis a commencé dans le trot, à l'école des jockeys de Graignes. Il montera en courses dans la discipline, et travaillera 6 ans en tout avec les trotteurs. C'est après l'armée qu'il va se tourner vers le galop, en travaillant d'abord avec Jacques-Charles Cunnington. Au début des années 1980, il rejoint l'écurie du légendaire François Boutin, où il côtoiera les plus grands champions des courses de l'époque comme Arazi, Kingmambo, East Of The Moon, Sagaro ou encore Linamix pour ne citer qu'eux. Parmi ces cracks, il y en a une qui les surpassent dans le coeur de Régis, c'est l'incroyable Miesque, championne aux 9 Gr.1. Parmi ses faits d'armes, il y a deux titres de Breeder's Cup Mile. Ces voyages aux Etats-Unis seront les premiers de Régis : "C'était mes premiers déplacements à l'étranger. J'étais comme dans un rêve. Tout était vraiment différent de la France, et d'avoir pu s'occuper d'une jument comme Miesque est un vrai honneur. Il y avait à cette époque une autre ambiance dans les courses, un vrai esprit d'entraide entre professionnels, qui manque peut-être un peu aujourd'hui."

 

Régis en 1991 à Evry, emmène un cheval de François Boutin. En selle, c'est Claude Piccioni, devenu depuis entraîneur.

Au gazon des Aigles avec Freddy head et Olivier Peslier. (APRH)

 

Chez François Boutin, Régis monte les galops et fait la connaissance d'un certain Freddy Head, qui monte à l'époque les cracks Niarchos. François Boutin décède en 1995 et deux ans après, Freddy raccroche les bottes pour s'installer entraîneur. Il commence avec une équipe d'anciens de chez François Boutin. Avec le premier garçon Roger Durepaire, arrive un garçon de voyage, Régis. Ils ne se quitteront plus, et Régis passera 22 ans au total chez Freddy Head, vivant de l'intérieur tous les succès et les déceptions du désormais crack-entraîneur. Car la machine fut longue à se mettre en marche. Le premier crack de Freddy, c'est Marchand D'Or, sprinter d'exceptions qui lui apportera le goût du haut niveau. Il en passera ensuite une tonne, avec des chevaux comme Solow, Moonlight Cloud, et bien sûr l'inoubliable Goldikova, "Goldi" comme la surnommait affectueusement Régis : " C'est certainement la jument de ma vie. Elle m'a emmené partout, et nous a fait connaître de grands frissons. C'était surtout un plaisir de faire toute la préparation. Dans le genre, les deux victoires de Gr.1 de Moonlight Cloud à Deauville en 8 jours (NDLR: prix Maurice de Gheest et Jacques Le Marois), en pulvérisant les records de Goldikova, furent aussi géniaux. On a connu beaucoup de joie à Deauville, et c'est beaucoup de préparatifs en peu de temps, ça fait vivre le tout de manière très intense."

La joie de Régis après une victoire de Goldikova. (APRH)

Ici aux côtés de la crack avant le prix d'Ispahan. (APRH)

 

Au total, c'est 42 Gr.1 pour Freddy Head, et pour Régis ! Le dernier a été avec Call The Wind dans le Cadran en octobre 2018. C'est d'ailleurs avec ce cheval que Régis a fait son dernier voyage, le week-end dernier à Dubaï. En retraite depuis ce 3 avril, il est quand même passé voir le champion ce matin. On ne peut pas se défaire de ses habitudes aussi vite. Comme un symbole, le dernier gagnant qu'a emmené Régis, C'est Motamarris, un des plus gros espoirs de la saison classique pour l'écurie Head. Il fallait bien cela pour clore une période mémorable. Pas question d'abandonner le métier pour Régis, qui va désormais aider son fils Gaël Barbedette, entraîneur depuis peu de temps. Il est même propriétaire de chevaux, et bien sûr il serait trop dur de quitter les hippodromes: " Les chevaux, on ne peut pas les quitter comme ça. Si j'arrête, c'est pour profiter de ma famille, mais la passion ne me quittera jamais. Ce métier m'a fait faire des choses incroyables, voyager aux quatres coin du monde. J'ai rencontré tellement de gens géniaux grâce aux courses, que ce soit à Dubaï, Hong Kong ou aux Etats-Unis. J'ai encore du mal à éteindre mon téléphone la nuit ! Je ne réalise pas trop que je suis à la retraite, il va falloir un peu de temps."

 

Les plus beaux voyages de Régis. Aux Etats-Unis, lors de la Breeder's Cup, sur le poney ! (photo Sophie Texeira).

Ici, son dernier partant à l'étranger, Call The Wind, à Dubaï. Ce cheval a aussi été son dernier Gr.1.

 

 

Les courses elles ne sont pas prêtes de prendre leur retraite, et Régis n'est d'ailleurs pas du tout défaitiste par rapport à ce sujet: "Il y a toute une génération de jeunes qui est motivée pour assurer l'avenir des courses. Maintenant, il faut que les institutions écoutent plus les acteurs de la filière, qui ont des choses à proposer. La situation n'est pas désespérée, il y a toujours beaucoup de passionnés qui aiment ce métier, et çà repartira. Je le vois avec mon fils Gaël, pour qui ce n'est pas toujours facile. Il se bat, et quand un cheval gagne, cela lui donne une joie qu'il ne trouverait pas ailleurs." Un beau message d'espoir pour les jeunes qui rêvent de courses 24h/24 ! Place à une nouvelle vie pour Régis, que l'on devrait quand même croiser souvent sur les hippodromes : "J'irais souvent aux courses pour le plaisir, mais au moins maintenant je pourrais rester au chaud quand il pleut ! ". En riant, on raccroche le téléphone, et on se rend compte qu'une nouvelle page se tourne dans l'histoire des courses...seulement pour en remplir de nouvelles. 

 

La relève Barbedette est bien assurée avec Gaël, jeune entraîneur à Lamorlaye ! (APRH)

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