Bien-ĂȘtre Ă©quin : " En regardant une course d'obstacle, on doit ĂȘtre excitĂ©, mais pas avoir peur "

16/07/2023 - Actualités
Parfois traité à n'importe quelle sauce comme tous les sujets à la mode, le cas du bien-être équin, fondamental pour la survie des courses, a été abordé de façon très concrète par tous les acteurs de la Crystal Cup. Président de ce championnat d'Europe de l'obstacle, Alain Peltier a ainsi réuni les directions des hippodromes membres, pour un colloque particulièrement instructif


Tous les responsables des hippodromes organisateurs d'étapes de la Crystal Cup ont participé à un colloque sur le bien-être équin, imaginé par son président Alain Peltier.
 

 

De Cheltenham à Pardubice, en passant par Craon, Le Lion d'Angers, Compiègne, Pau et Fontainebleau, sans oublier Merano, Waregem et jusqu'à Wroclaw en Pologne, les organisateurs des étapes de la Crystal Cup sont les responsables de courses les plus directement confrontés au sujet du bien-être équin. Etant donné qu'ils proposent des courses  d'obstacle, qui plus est des cross, ou des steeple sur des gros parcours et des longues distances, face à des foules dans certains cas immenses, le sujet peut leur revenir en pleine face comme un boomerang particulièrement dévastateur. C'est pourquoi, depuis plusieurs années, dès que la thématique du bien-être équin est devenue un véritable sujet de société comprenant sa minorité intégriste, ces présidents et directeurs ont pris le sujet à bras le corps. Ils ont tous témoigné dans le cadre d'un échange passionnant organisé par Alain Peltier sur l'hippodrome du Lion d'Angers.

 


Ian Renton, le représentant de Cheltenham.

 

Il en ressort que pour avancer, il faut marcher sur 2 jambes : la technique et la communication. Malheureusement, ces deux aspects de la vie ne cessent de s'affronter et de se mépriser, sauf quand il y a des hommes forts qui tiennent la boutique et obligent les gens à travailler ensemble, ce qui est en général le cas des cadres de la Crystal Cup. Ainsi, presque partout, une partie voire tous les obstacles ont été refaits ! Cheltenham a changé la couleur des obstacles, passant d'orange à blanc. Fait extraordinaire, le festival des 4 jours de Cheltenham n'a déploré que 3 chutes en haies... et pas une seule en steeple ! A Mérano en Italie, même s'il explique que le sujet du bien-être équin est sans doute moins prégnant qu'ailleurs, notamment outre-Manche, Mario Pirone a anticipé. " Nous avons refait tous les obstacles, on avait des obstacles dangereux et trop de blessés. Maintenant, on peut vraiment traverser les "verts" et il y a plus de partants. Egalement, en raison du réchauffement climatique, nous avons modifié notre programme selon les saisons. Par exemple, au premier semestre, les courses d'obstacle ont été avancées pour se terminer en juin plutôt que de courir l'été."

 

 

Les obstacles naturels, dits "verts" car composés de haies vertes, doivent en effet être surveillés comme le lait sur le feu car ils évoluent chaque jour. A Craon, Hugues Crosnier a été confronté au problème. " Nous avions remarqué de plus en plus de soucis avec la haie verte de la rivière des tribunes, à mi-ligne droite. On a trouvé la cause. Au fur et à mesure des années et des tailles, les bois s'étaient trop épaissis et la haie était devenue trop difficile à traverser. La taille végétale est donc un sujet majeur, mais attention, il ne s'agit pas pour autant de réduire la taille... des obstacles en eux-mêmes, pour éviter que les vitesses des courses augmentent encore." De Strasbourg au Lion d'Angers, Lucien Matzinger et Alain Peltier parlent le même langage, car de nombreux obstacles y ont été refaits dans leur forme, mais sans diminuer la taille. Représentant de l'association des jockeys, Thierry Gillet constate les mêmes progrès : "  Beaucoup d'améliorations ces dernières années sur les obstacles, qui sont de plus en plus en matière PVC. Les discussions vont mieux entre les jockeys et les hippodromes, même si je reconnais bien volontiers que les jockeys sont râleurs ! Tristan Leroyer, de France Galop, est très présent sur le terrain et les jockeys régionaux se déplacent quand ils sont consultés pour des travaux. Bref, ça marche."

 

 

En Pologne, les résultats des changements ont été immédiats. " Il y avait beaucoup de discussions sur les réseaux sociaux après chaque chute. Les obstacles ont été refaits, de façon plus sécurisée, et les discussions se sont calmées".

Côté communication, l'Angleterre est en 1ère ligne, ayant déjà subi depuis plusieurs années les pires menaces ou actions directes contre ses courses. A Cheltenham, Ian Renton explique : " Il faut montrer à la population qu'on s'occupe beaucoup du bien-être animal, mais sans lutter frontalement contre Peta. Waregem n'a pas été épargné par les actions chocs, et a adopté une méthode politique habile, comme l'explique le Baron Philippe Casier : " Nous avons signé un accord avec l'association Gaia, qui s'était enchaînée devant la rivière il y a 25 ans. Nous avons commencé par leur demander leur objectif, à savoir s'ils voulaient annuler les courses purement et simplement. Vu que ce n'était pas le cas, on travaille avec eux, via un observateur, et cela se passe bien. Nous avons interdit les oeillères, ce qui est plus sécurisant pour les chevaux lâchés. Notons également que la WHW (World Horse Welfare) basée à Londres est une association civilisée que nous considérons comme des partenaires beaucoup plus que des opposants.

 


Alain Peltier reçoit un trophée de la part de Frédéric Landon.

 

De même, Pardubice doit tenir un équilibre savant. En République Tchèque, le Grand Steeple est le 1er événement sportif du pays, qui regroupe 25.000 personnes dans les tribunes et 2 millions de téléspectateurs regardant un programme réalisé avec 40 caméras. Mais le 4e obstacle, le redoutable Taxi, reste tristement célèbre même s'il a été modifié. " Il faut parler aux gens. Pour cela, on organise de nombreuses visites de presse, au cours desquelles on explique tout ce qu'on fait pour la sécurité. Après ce qui s'est passé à Aintree, on doit tous se préparer. Quand on regarde une course, on doit être excité, mais ne pas avoir peur."

Il semble peine perdue de chercher à convaincre les activistes acharnés, que François Gorioux appelle justement des intégristes, dont un sondage récent a démontré que 20% d'entre eux pensent que même les balades à cheval devraient être interdites. A l'image des visages connus de la France Insoumise, ces forcenés ne cherchent qu'à provoquer le chaos insurrectionnel. Cela leur permettrait d'imposer leur pensée unique et la dictature, celle dont ils accusent la terre entière mais qu'ils rêvent de pratiquer tels des Ayatollah des LGBT et des haricots verts. C'est à tout le reste de la population, heureusement beaucoup plus nombreuse mais aujourd'hui très sensible au sujet, qu'il faut parler tous les jours. Quitte à se forcer à ouvrir ses modes de pensée.

Nouveau président du Lion d'Angers, André Martin témoigne. " Nous avons connu ce malheureux arrêt au milieu du France Sire Anjou Loire Challenge à cause d'une lice qui n'avait pas été retirée. Mais à ma grande surprise, ce n'est pas ce qu'a retenu le public de la journée. J'ai parlé à de nombreuses personnes après coup, qui ont plutôt retenu que les 2 chutes avaient été sans conséquence et qu'il y avait des pommes de douche directement sur la piste pour rafraichir les chevaux. " Notons que l'hippodrome du Lion d'Angers, aujourd'hui doté du label Equures (un axe de communication très important), donne le départ du cross le plus long du monde en début de soirée, pour éviter les pics de chaleur. Dans le même esprit, Hugues Crosnier avait fait décaler le départ du Grand Cross de Craon à 20H30 en 2021, un jour de canicule.

Enfin, président de Fontainebleau, mais aussi représentant France Galop, Frédéric Landon a rendu compte des actions de la maison mère. " Concernant la cravache, dont le nombre de coups autorisé a été réduit à 4, il est envisagé que l'ordre d'arrivée puisse être changé en cas d'infraction. Beaucoup d'efforts sont faits pour la marque "RaceandCare". Nous améliorons les lices, obstacles, dispositifs de prise en charge lors accidents (bâches, vans ambulants, etc...). Nous travaillons beaucoup dans la lutte contre le dopage, avec 26.000 contrôles sur les 220.000 partants à l'année, ce qui représente un coût de 11 millions d'euros. Ces chiffres doivent être comparés aux 10.000 contrôles seulement qui sont réalisés en France pour l'ensemble de tous les autres sports. Par ailleurs, on se pose actuellement à France Galop la question des saisons pour les courses d'obstacle, en fonction de l'augmentation des températures, pour la santé des chevaux mais aussi des jockeys. On milite pour que les courses d'obstacle l'été se déroulent le plus possible sur les hippodromes de bord de mer. Mais il faut se rassurer tout de même par cette étude récente qui démontre que 71% pensent que le bien-être des chevaux de courses est assuré."

Pour conclure, il est clair que pour que les courses perdurent, et l'obstacle en particulier, il faut ramener le cheval en général dans la société tous azimuts, à commencer par les écoles, en l'associant toujours avec son aspect défense de l'environnement, qui est un argument imparable pourvu qu'on s'en serve. Les délires des extremistes complotistes ne peuvent fonctionner que sur une population ignorante... et donc à qui notre partie ne parle pas.

Problème le plus visible de la thématique, le sujet de la cravache a été pris sérieusement en compte dans toute l'Europe. On se rappelle les interminables articles sur le Racing Post expliquant que les jockeys ne sauraient plus monter une course avec la nouvelle règle. Les anglais en font toujours des tonnes... Tout s'est éteint avec un Festival de Cheltenham qui s'est très bien déroulé, tout comme les suivants en plat ou en obstacle (Aintree, Newmarket, Punchestown, Epsom, Royal Ascot). Les courses sont autrement plus belles à voir comme ça qu'avec certains peintres assis le cul dans le charriot les bras agités en l'air. Reste qu'il faudrait enfin changer le modèle des cravaches, qui soit disant ne font pas mal mais qui font un bruit d'assassins dont l'effet est catastrophique pour le public, et surtout les enfants n'arrivant évidemment pas à comprendre pourquoi on frappe les chevaux de courses !!!

 

PARTICIPANTS AU COLLOQUE BIEN ETRE EQUIN :

Crystal Cup : Alain Peltier (Président)
Pardubice : Jarowlaw Muller (Directeur)
Wroclaw : Président et Directeur
Merano : Mario Pirone (Président)
Cheltenham : Ian Renton (Jockey-Club)
Pau : pouvoir Frédéric Landon
Compiègne : Jean de Cheffontaines (Vice Président)
Fontainebleau : Frédéric Landon (Président)
Le Lion d'Angers : André Martin (Président)
IFCE : François Gorioux
Association des Jockeys : Thierry Gillet
Strasbourg et Trophée National du Cross : Lucien Matzinger (Président)
Délégué Général Crystal Cup : Philippe Foucher
Conseil Départemental Maine-et-Loire : Nuruddine Muhammad
Région Pays de Loire : André Martin (vice président)
France Sire : Arnaud Poirier
Le Courrier de l'ouest : André Bourgeais

Le colloque a été organisé avec l'accueil de la Société des Courses du Lion d'Angers et l'aide financière de la Région Pays de la Loire, le département du Maine-et-Loire et la fédération Nationale des Courses Hippiques.

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