DNA : la contre-histoire de Byerley Turk

17/06/2020 - Chef de race
Thierry Grandsir nous raconte aujourd'hui la contre-histoire de Byerley Turk, l'un des 3 pères fondateurs de la race du pur-sangs anglais, mais dont l'origine donne encore lieu à des débats de spécialistes particulièrement animés. Voici une version...
 
 
 
BYERLEY TURK (1684)
 
 
Quoi de plus important pour un officier de cavalerie que sa monture. Pour lui, la plus noble conquête de l’homme se doit d’être solide, docile, courageuse, bien équilibrée, aux ordres, endurante, rapide, et même très rapide si possible car la vie de son cavalier en dépend largement. Le capitaine Robert Byerley, né en 1660 et fils du colonel Anthony Byerley de Middridge Grange qui dirigeait en son temps le célèbre escadron Byerley’s Bulldogs pour le compte du roi Charles I, pouvait être fier de son destrier, connu sous le patronyme ByerleyTurk.
 
Bai brun presque noir dénué de blanc (zain), subtile alliance de noblesse, d’élégance, de courage et de vitesse, Byerley Turk était un cheval oriental de la plus pure race arabe, contrairement à ce que laisse entendre son nom. Né aux alentours de l’an 1680 (entre 1679 et 1684 selon les sources), il aurait été « emprunté » à l’armée Ottomane par le capitaine Robert Byerley lors de la bataille de Buda (Hongrie), en 1687, après plusieurs jours de traque tant le cheval se montrait fougueux !
 
 
 
 
Il aurait été importé en Angleterre en compagnie de Lister Turk l’année suivante.C’est du moins ce que stipule la Légende, car d’autres sources se font l’écho de témoignages selon lesquels ByerleyTurk aurait été capturé lors du siège de Vienne en 1683, et importé deux ans plus tard.  
 
De grands débats subsistent autour de son origine. En effet, certains historiens du cheval conteste son origine arabe pour lui apporter plutôt une origine turkmène, c'est à dire qu'il serait représentant de la race mythique des Akhal Tékké.
 
Pour sa part, C.M. Prior soutient la thèse selon laquelle le cheval serait né en Angleterre, élevé par Robert Byerley lui-même, et conçu par Place’s White Turk ou un de ses fils. Qu’importe, il est avéré que le capitaine Robert Byerley, ayant accédé entre temps au grade de colonel de l’armée Britannique, utilisa ce cheval et nul autre pour combattre en Irlande et en Ecosse sous la banière du roi William III (Guillaume d’Orange).
 
Doté d’une vitesse exceptionnelle, ByerleyTurk sauva maintes fois la vie à son cavalier et multiplia les exploits militaires. On raconte d’ailleurs que, se rendant à la bataille de Boyne au printemps de l’année 1690, le colonel Byerley et sa monture firent une halte pour disputer une course à Downpatrick en Irlande du Nord, où ils remportèrent une victoire gratifiée d’une Cloche d’Argent (Silver Bell) avant de reprendre tranquillement leur chemin…Byerley Turk se montra héroïque le 12 juillet suivant à Boyne face aux forces du roi James II, comme d’ailleurs Lister Turk.
 
L’heure de la retraite ayant sonné pour le colonel Byerley, alors député à la Chambre du Parlement Britannique, son cheval ByerleyTurk entra au haras à Middridge Grange avant d’être transféré en 1697 à Goldsborough Hall, près de Knavesborough dans le North Yorkshire. Il ne saillit que très peu de juments de qualité mais engendra de nombreux très bons performers dont surtout Basto, Rutland’s Archer, Kingston’s Sprite et Godolphin’s Byerley Gelding.
 
 
 
 
CROFTS PARTNER, petit-fils de BYERLEY TURK et grand-père de HEROD
 
 
Excellent père de mères, ByerleyTurk est à la base des plus grandes souches classiques, dont les Familles 1, 2, 3 et 8. Parallèlement, il sut établir une lignée mâle encore vivace de nos jours : son fils Basto s’avéra très influent en son temps mais c’est via Jigg, qualifié par le General Stud Book d’étalon de campagne assez commun, que l’histoire se poursuivit. 
 
Jigg conçut de nombreuses poulinières classiques et un Champion, Crofts Partner, considéré comme le meilleur performer de son temps à Newmarket. Invaincu de 5 à 8 ans dans des matches courus sur 6400 m, la distance usuelle à l’époque (4 miles), il ne connut qu’une seule fois la défaite, à l’âge de 10 ans, avant de se classer étalon tête de liste des pères de gagnants en 1737, 1740, 1741 et 1743 en Angleterre.
 
Si son grand-père Byerley Turk apparaît dans le pedigree de Marske, le géniteur du légendaire Eclipse, Crofts Partner devint pour sa part le père de mère de Matchem et le grand-père de Herod, ce qui situe clairement l’influence prépondérante du cheval de Robert Byerley aux origines de la race pure !
 
 
 
HEROD (1758), un des trois grands patriarches de la race pure
 
 
Initialement nommé King Herod, né en 1758 des œuvres de Tartar (Crofts Partner) et de Cypron (Blaze), Herod était un cheval splendide qui remporta 6 victoires de 5 à 9 ans en 10 sorties avant de s’octroyer huit titres d’étalon tête de liste des pères de gagnants, de 1777 à 1874 inclus !
 
On lui doit quatre vainqueurs classiques dont trois lauréates des Oaks St. (Gr.1). Pour bien mesurer son impact, il suffit de rappeler que Diomed, le premier lauréat du Derby d’Epsom de l’Histoire, a été conçu par un de ses fils, et surtout que 72 vainqueurs classiques portent dans leur pedigree un inbreeding en 4x4 ou inférieur sur Herod
 
Un Herod qui eut l’heur d’engendrer le Chef de Race Highflyer, dont le record de treize titres d’étalon tête de liste ne fut battu que deux siècles plus tard, par un certain Sadler’s Wells. La lignée mâle de ByerleyTurk, relayée par Tourbillon et Djebel, survit aujourd’hui avec les descendants de Indian Ridge et de Luthier. Longue vie aux fils du Cheval de Guerre !
 
 

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