1er Gr.1 de Too Darn Hot : l'histoire finit toujours par se répéter !

11/09/2023 - Grand Destin
Fallen Angel a hier offert un 1er Gr.1 au jeune étalon sensation Too Darn Hot. Né pour briller, et brillant, le fils de Dubawi et Dar Re Mi illustre une histoire d'élevage qui se répète à travers les décennies, découlant de quelques inbreedings très osés de la part de Marcel Boussac. 

Too Darn Hot, l'héritier d'une longue tradition...qui se répète !

 

Lui qui fut le meilleur 2 ans de sa génération, et un champion aux 3 Grs.1, Too Darn Hot a fait figure d'attraction quand il a débuté au Haras à Dalham Hall Stud à 50 000 £. Il avait tout pour réussir sur le papier, mais cela ne suffit parfois pas. L'histoire commence à nous prouver pourtant que Too Darn Hot a tout pour être un étalon d'exception, avec déjà 2 gagnants de Gr.3 issus de sa 1ère génération, et désormais une première gagnante de Gr.1 grâce à Fallen Angel, qui a hier remporté les Moyglare Stud Stakes (Gr.1) au Curragh. La machine est lancée... et l'histoire se répète ! 

 

 

Car oui, Too Darn Hot provient d'un croisement et d'une famille extraordinaire, où l'histoire s'est souvent répétée, même s'il a parfois fallu attendre longtemps. Le poulain a été élevé par Andrew Lloyd Webber, grande figure des courses anglaises, mais aussi du Music Hall, puisqu'il a créé quelques uns des plus grands tubes de comédies musicales de Broadway. La mère de Too Darn Hot, Dar Re Mi fut elle-même une immense championne en piste avec 3 succès de Gr.1 et d'innombrables places à ce niveau. Elle n'a pas été en reste au haras avec beaucoup de produits black -types, dont un certain De Treville, étalon à Sumbe qui saillit peu mais a de remarquables statistiques. Dar Re Mi est une fille de la grande jument Aga Khan Darara, qui est devenuela jument de base de l'élevage de la famille Lloyd Webber, qui grandit à Watership Down Stud. D'ordinaire, cet élevage vend tous ses mâles, mais Too Darn Hot avait connu un souci foal l'empêchant de passer sur un ring... Encore un coup de pouce du destin !

 

Too Darn Hot lors de son succès dans le Prix Jean Prat avec Frankie Dettori (aprh)

 

Gagnante du Prix Vermeille (Gr.1), Darara fut achetée en provenance de l'élevage Aga Khan pour un peu moins de 500 000 Gns par les Lloyd Webber, en 1994. Elle était certes une championne née dans la pourpre, mais n'avait jusqu'ici rien produit d'extraordinaire pour le Prince, étant croisée à des étalons peu recommandables comme Shahrastani et Doyoun. Et parfois, il suffit juste de changer d'air pour faire des miracles. Darara a d'emblée donné à Watership Down Stud de bons chevaux, dont Rhagaas, 3e du Jockey Club de Montjeu (Gr.1), puis River Dancer, devenu gagnant de Gr.1 à Hong Kong. Darara connut ensuite 4 ans sans produire, mais fut remise sur les bons rails avec le concours de nombreux vétérinaires et experts. En cadeau pour son retour, elle donna une femelle aux Lloyd Webber, pour poursuivre l'aventure. Elle a ensuite produit à 22 et 24 ans ses deux meilleurs rejetons : Dar Re Mi, mais aussi le crack Rewilding, gagnant de la Dubai Scheema Classic comme sa grande soeur. 

 

La petite Darara, pas très sexy au modèle, mais diablement efficace au Haras pour les Lloyd Webber

 

Mais cette histoire est en fait celle d'inbreedings très prononcés. D'abord celui de Too Darn Hot sur la poulinière Sunbittern, grand-mère d' In The Wings, qui est le grand-père maternel de Too Darn Hot, et appartient à la famille de son père Dubawi. Une histoire qui fonctionne souvent en élevage. On retrouvait d'ailleurs 2 fois dans le pedigree de Darara la grande poulinière Astronomie, à l'origine de nombreux champions comme Caracalla, Arbar, Arbel et Marsyas. Formidablement bien née, Darara descendait d'une grande souche Boussac, acquise par le Prince Aga Khan à la fin des années 70 avec la mère Delsy. Elle a transformé le destin des "verts et rouges" en donnant Darshaan, crack en piste qui a battu Sadler's Wells et Rainbow Quest dans le Jockey Club, avant de devenir un étalon de tout premier plan. 

 

Delsy, la mère de Darshaan et Darara, une bonne jument de tenue entraînée à l'époque par Roger Poincelet (photo Aga Khan Studs)

 

On ne cesse de le dire et l'histoire de nous le prouver, mais Marcel Boussac a changé la face du monde hippique avec son élevage. Il a notamment redoublé d'inbreedings très osés, d'abord forcés par le fait que pendant la Guerre, il était obligé d'aller à ses étalons et ne pouvait pas sortir de chez lui ! Mais tout ce qui en a découlé l'a poussé à continuer la formule, qui donne des chevaux souvent ombrageux, mais qui améliore considérablement la génétique à suivre. Ainsi, à la fin des années 30, il a tenté un croisement très osé pour faire naître une certaine Tourzima. Ainsi, elle était la petite-fille de deux propres soeurs issues de Durbar et Banshee : la fameuse Durban, qui est la mère de son père Tourbillon, et Heldifann, à l'origine de sa mère Djezima. Le résultat fut un cas d'école. Tourzima a gagné sa seule course, mais est rentrée au haras rapidement car elle était... complètement folle ! Sa descendance a toutefois récompensé l'audace de Marcel Boussac, et bien d'autres personnes. 

 

Marcel Boussac, un éleveur qui avait de l'audace dans ses croisements !

 

Tourzima a d'abord bien produit, avec plusieurs lauréats black types dont Corejada, gagnante du Marcel Boussac, de la Poule d'Essai des Pouliches, et des Irish Oaks. Mais c'est surtout les innombrables branches de la souche qui ont fleuri dans les meilleurs élevages mondiaux. Elle est la 10e mère de Pyledriver pour une bande de copains, la 6e mère de Taghrooda pour la surpuissante entité Shadwell, et on la retrouve dans la lignée directe de chevaux marquants du Prince Aga Khan comme Akiyda (Arc de Triomphe), Sinndar, Estimate... et bien sûr Darshaan et Darara. Ainsi, Tourzima est la 7e mère de Too Darn Hot, qui illustre à merveille que l'histoire ne cesse de se répéter quand on sait faire les bons croisements. D'ailleurs, le sien, celui de Dubawi sur une mère par Singspiel, est l'un des plus réussis pour la star étalon de Darley, puisqu'il a donné outre Too Darn Hot les gagnant(e)s de Gr.1 Old Persian, Wuheida, et Left Hand

 

Extrêmement polyvalent, Darshaan a marqué l'élevage mondial de son empreinte

 

En fait, un regard pointu sur toute la descendance de Tourzima démontre l'incroyable polyvalence de la famille, qui donne des sauteurs, des gagnants précoces à haut niveau, et des sujets bien plus classiques comme Darshaan. Cela s'illustre dans la progéniture de certains étalons de la souche comme Hunter's Light, lointain descendant de Tourzima, et issu de la proche famille de Too Darn Hot, qui frappe aussi bien en plat qu'en obstacle. Darshaan a lui-même réussi dans tous les registres, comme père, père de mère (d'exception d'ailleurs !), mais aussi en utilisation en inbreeding, bien qu'il soit un cheval de tenue dont la sur-utilisation devrait en toute logique aller contre la vitesse. Il n'en est rien ! 

 

Too Darn Hot est d'ailleurs un parfait représentant de ce potentiel génétique, lui qui fut un 2 ans précoce et véloce, mais capable d'évoluer sur le mile à 3 ans. La tenue, il l'a dans son pedigree maternel, et d'ailleurs ses 2 ans progressent au fur et à mesure de la saison, ce qui est bon signe en vue de l'année de 3 ans. Il apporte par dessus tout une alternative de luxe au sang omniprésent de Sadler's Wells, dont il est indemne ! Bref, il a l'allure d'un vrai successeur pour Dubawi. Il est trop tôt pour le dire, mais si l'histoire se répète comme c'est le cas dans cette famille, nous en parlerons longtemps encore. 

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