Animal Kingdom : yes, you can !

10/05/2011 - Grand Destin
Alors que le Président Barack Obama n’en finit plus de célébrer le succès de l’opération Pakistanaise visant à tuer Ben Laden, le public américain fête à sa façon son amour patriotique version cheval lors du Kentucky Derby, la plus  grande et la plus caractéristique des courses aux Etats-unis. Comme le peuple US, le vainqueur est né d'un grand brassage de population équine.

 

Ils étaient 164 858 (un record) samedi à Louisville pour assister à l’un des rendez-vous purement "ricain" de l’année sportive : le Kentucky Derby. A quelques miles de la base de Fort Campbell où le Président des Etats-Unis est venu décorer les héros de l’opération Geronimo, les spectateurs de Churchill Downs ont applaudi Animal Kingdom, pur résultat d’un travail commun de migrants – humains et équins -.

 

Animal Kingdom s'envole dans le 137e Kentucky Derby



L’anglais patient

L’émotion de l’entraîneur Graham Motion après le succès de son pensionnaire dans LA course qu’il faut gagner aux Etats-Unis, est palpable. Il avoue même avoir essuyé quelques larmes avant de s’exprimer à la presse. Arrivé chez l’oncle Sam à l’âge de 16 ans avec son père anglais Michael, personnage influent de l’agence de ventes Tattersalls, Graham Motion est aujourd’hui titulaire d’un palmarès riche de plus de 1000 gagnants dont 2 lauréats de Breeders’Cup (Better Talk Now – Turf 2004 et Shared Account – Filly and Mare Turf 2010). Il remporte son premier Kentucky Derby après 30 ans de carrière américaine.

 

Graham Motion, l'entraineur anglais d'Animal Kingdom



La filière sud-américaine

Côté jockey(s), et comme souvent aux "States", c’est du côté du Sud qu’il faut se tourner puisque John Velazquez est né sur l’île de Porto-Rico. Après avoir débuté son métier dans son pays natal, le jeune jockey lance sa carrière américaine à New-York où il fut sacré meilleur jockey de 2001 à 2004. Mais l’histoire retiendra surtout qu’il n’aurait jamais dû se retrouver sur le dos d’Animal Kingdom. Victime d’une fracture du nez mercredi, Robby Albarado (originaire de Louisiane), le jockey attitré d’Animal Kingdom, a été jugé inapte à se mettre en selle par l’entourage du cheval ! La roue de la fortune tourne pour John Velazquez qui remporte lui aussi son 1er Kentucky Derby.

 

John Velazquez, jockey porto ricain qui s'est imposé comme un leader aux USA, remporte son 1e Kentucky Derby


Mais le choix n’est certainement pas dû qu’au hasard : Velazquez a en effet été le jockey du top-miler Leroidesanimaux, le père d’Animal Kingdom. Ensemble ils gagnèrent Groupe 1. Leroidesanimaux bat pavillon brésilien ayant été élevé par le Haras Baga Do Sul, dans la banlieue de Rio de Janeiro. Sa grand-mère Kerali est une soeur d’Hasili, la fantastique matrone à qui l’on doit Dansili, Intercontinental, Banks Hill, Cacique, Heat Haze et Champs Elysées. Leroidesanimaux, magnifique alezan, est stationné sous le soleil de Floride et proposait ses services en 2011 à 10 000 dollars.

 


Leroidesanimaux, brésilien et puissant père d'Animal Kingdom



L'héritage français

Brésilien, Leroidesanimaux (que les commentateurs US n'ont jamais réussi à prononcer convenablement) porte un nom français. Il transmet un sang très "frenchie" dans la lignée mâle de son pédigrée. En effet, avant d'être exporté, Candy Stripes a terminé 2e du Grand Critérium (Gr.1) 1985 chez Georges Mikhalides sous la casaque de Mahmoud Fustok. C'est un fils de Blushing Groom a avec une mère de l'époque de Nelson Bunker Hunt issu d'une mère française par Lyphard. Autant de grands étalons qui ont quitté la France dans les années 70.

 

Candy Stripes, le grand-père de Animal Kingdom est issu d'une souche purement "Fr"
 


La filière de l’Europe de l’Est : de la Hongrie à la Russie

Côté maternel, la surprise est de taille : Dalicia est allemande. Placée de Listed à 3 ans, gagnante de Groupe 3 à domicile à 4 ans, elle prit des places dans le Prix du Prince d’Orange, Grand Prix de Compiègne et Prix Corrida en France, sous la férule de Peter Rau. Vendue 400 000 euros (!!)  aux ventes de Baden Baden et exportée aux Etats-Unis, Dalicia prend une quatrième place dans le Beverly Hills Handicap 2006 (Gr.2). Saillie en 2007 par Leroidesanimaux, Animal Kingdom est donc son premier produit, et fut vendu 100 000 dollars à ses propriétaires actuels sur le ring de Keeneland en septembre 2009. Mais comme il semble écrit que Dalicia fera le tour du monde, elle fut ensuite achetée en décembre 2009, 350 000 euros à Newmarket, par Shadai Farm et pleine de Mr Greeley. Quelle magnifique opération pour les nippons !

 

Dalicia, la mère d'Animal Kingdom, est allemande et a été une très bonne jument de course. Elle a été acquise récemment par les japonais de Shadaï Farm; quelle embellie !



Et pour conclure sur une note encore plus exotique, notons que la mère de Dalicia, grand-mère donc de vainqueur de Kentucky Derby, fut exportée en fin de carrière en Russie, au haras de Volvograd au sud du Pays, non loin de la Mer Noire. Mais cela n'est finalement qu'un retour familial vers l'ancien bloc de l'Est. En effet, tout la souche maternelle vivait en Hongrie depuis le début des années 1920, jusqu'à l'importation de la 6e mère Didergo dans les années 60 par Gestut Roettgen en Allemagne, où elle a donné naissance en 1969 à Diu, la 5e mère, qui fut une excellente jument de course lauréate du Prix de Diane germanique.

Voilà donc une belle histoire de migrants ayant réussi aux Etats-Unis !

Fabien Cailler - TurfCom

Voir aussi...