Toutancarmont, histoire de l'héritier d'une dynastie

19/12/2012 - Grand Destin
Le futur pharaon du Cross pourrait bien s’appeler Toutancarmont. L’élève de la famille Pacault-Chérel-Evain a réalisé un exploit mardi à Pau en s’imposant sous la montagne de 77kg.

Un authentique exploit

 
On aurait pu faire appel à Howard Carter, l’archéologue britannique qui a découvert la sépulture de Toutânkhamon en 1922, pour savoir combien de sauteurs ont gagné dans l’ère moderne avec un tel poids sur le dos dans nos chères contrées. Mais ces fouilles ont finalement été dirigées par le digne successeur de Carter, mode France Sire : Xavier Bougon. Et voici le résultat : Héros XII remportait l'édition 1921 du Prix du Président de la République avec 77 kg puis avec 79 kg. Coq Gaulois en fit de même sous 76 kg en 1920 puis Fifrelet en 1953 également avec 76 kg sur les reins. Au siècle précédent, Congress décrocha le Grand Steeple de Paris 1877 sous 80 kg et enfin L’Yser, dont on se rappelle tous, dans le Grand Prix de Pau en 1923 sous 79 kg.
 
 
Portant la casaque Papot, l'élève d'Isabelle Pacault Toutancarmont gagne le cross de Pau sous la selle de Jonathan Plouganou chargée de...77 kilos !
 
 
Toutancarmont a donc réalisé un authentique exploit en allant au bout des 4 100 mètres du Cross palois, écrasé par cette selle surplombée que son pilote inspiré Jonathan Plouganou s’est évertué à transformé en plume. 77 kg sur le dos et à 5 ans : le mot exploit n’est vraiment pas usurpé ! Pour ses débuts sur les beaux morceaux palois, petit passage de route compris, le fils d’Al Namix a démontré ses qualités de sauteur exceptionnel en digne héritier d’une dynastie importante dans le royaume de l’obstacle.
 

 
le Haras de Mirande, où Toutancarmont a été conçu et élevé.
 
Le « bien nommé » Toutancarmont
 
Il aurait pu s’appeler « Toudemirande » mais ses éleveurs ont choisi Toutancarmont.
 
Né le 9 avril 2007 au Haras de Mirande dans la Manche chez Isabelle Pacault, la compagne de Guy Chérel, Toutancarmont est fils de l’étalon maison Al Namix et de Furie de Carmont, elle-même par Carmont. Celui-ci fut la pièce fondatrice de Mirande, étant acquis par Jean-Claude Evain, le père de la maîtresse actuelle des lieux. Carmont, vainqueur du Prix du Président de la République 1981 puis deuxième du Grand Steeple-Chase de Paris, le tout donc malgré la présence de ses attributs masculins entre les postérieurs, était lui-même un fils de Carmarthen (père de Katko). Il est d’ailleurs, avec le plus discret mais efficace Cap Martin (meilleur produit Voretin – Prix Ingré 1993), le second rejeton à en avoir assuré la descendance dans le Stud-Book.
 
 
Dans la foulée de sa victoire dans le Prix du Président de la Répubique, Carmont (n°6) termine 2e du Grand Steeple-Chase de Paris 1981 derrière Isopani, le 1e AQPS à triompher dans cette épreuve.
 
 
Isabelle Pacault : " il a fallu courir sur la piste pour sauver la mère de l'euthanasie "
 
Sa mère AQPS Furie de Carmont débuta en course à 4 ans par une prometteuse 4e place dans le Prix de l’Yonne avant d’être arrêtée lors de sa seconde tentative à Auteuil. Isabelle Pacault se rappelle : « La jument s’était fracturée le canon et il avait fallu courir sur la piste pour éviter que le véto ne la sacrifie. On a bien fait. » Sauvée, Furie est dirigée aussitôt vers le haras, soignée puis saillie par l’autre étalon maison, mort depuis, Goldneyev, pour donner un premier champion : Lord Carmont (7 victoires dont les Prix Murat 2005 et Héros XII 2008, 24 places et plus d’un million de gains). La suite fut moins glorieuse même si Ma Furie réussit à gagner une course à Pau avant d’être exportée en Angleterre (une belle affaire pour celui qui la retrouve chez nos chers voisins ?...). En revanche, Ofurie, Par Furie, Quick Carmont (pourtant propre frère de Lord Carmont) et Rhétorique n’ont pu ouvrir leur palmarès. Idem pour le 2e produit de Furie de Carmont, Nassesseuse, inédite mais qui a eu le mérite de donner dès sa première année l’excellente Télénomie, lauréate de 6 courses dont une il y a dix jours justement à Pau sous 70 kg (on sait porter le poids dans la famille…).
 
 
Frère ainé de Toutancarmont, le très fougueux Lord Carmont a été l'un des meilleurs steeple-chasers d'Auteuil.
 
 
Guy Chérel : " la grand-mère faisait 1,10 m les bras levés !"
 
Derrière ces éléments récents se cache donc, comme toujours, une souche maternelle de grande valeur. En l’espèce, il s’agit de Quina du Perche (par Beaugency et Djoumie par Vieux Chateau), super jument de course entraînée par le jeune Guy Chérel au milieu des années 80 et représentant les couleurs de Jean-Claude Evain. Ce dernier avait judicieusement acquis ce petit bout de jument, au cœur gros comme elle. Sacrée championne de France de Cross 1990 finissant deuxième du Grand Cross de Pau avant de remporter ceux de Mont-de-Marsan, de Compiègne et de Lyon, elle acheva sa carrière par une deuxième place dans celui de Corlay. Son entraîneur de l’époque se rappelle de sa carrière au jour près, comme si c’était hier : « Quina faisait 1m10 les bras levés mais quelle championne, quelle sauteuse exceptionnelle, s’exclame-t-il ! Mon beau-père l’avait achetée à M. Lamotte d’Argy car la pouliche était totalement infirme, ses antérieurs étant arqués comme si elle avait appris à faire du cheval sur un tonneau… (rires).
 
 
 
A gauche, le 1e produit de Quina du Perche, donné avant que celle-ci ne retourne aux courses pour remporter le championnat de France de Cross, vient de remporter le Grand Cross de Craon 1995, monté par Loïc Manceau. Avec lui, l'alezan Janimont, monté par Stéphane Juteau, et entouré par Jean-Claude Evain avec sa fille Isabelle et sa petite-fille Anne-Sophie Pacault. (PHOTO BRIENS)
 

Une jument qui recourt après avoir donné son 1e poulain !
 
 
Après un début de carrière difficile, on l’avait envoyé sur le Cross de Vichy et ce fut une révélation." poursuit Guy Chérel. " Elle s’était envolée et avait gagné avec 50 mètres d’avance. On a décidé ensuite de la faire saillir par Pot d’Or et nous a donné le très bon Bol d’Or II (NDLR : gagnant du Grand Cross de Craon 1995). Une fois le poulain sevré, on a remis Quina dans le circuit et pour sa rentrée, elle avait gagné de 100 mètres à Agen ! Puis, elle n’a jamais déçu. Je me rappelle, un jour à Pau, deux adversaires avaient décidé de venir la chatouiller sur la grosse banquette car elle allait toujours devant. Mais, ils en ont été pour leurs frais, les deux pilotes finissant un mètre au-dessus de leurs propres montures et leurs chevaux s’emplafonnant le fromage. Ah non, vraiment, elle était incroyable ! »
 
Quina du Perche était une sœur d’Otage du Perche (aussi bon que compliqué et il était vraiment très bon), lauréat du Grand Steeple-Chase de Paris 1985 et Prix La Haye Jousselin 1986. A Toutancarmont de poursuivre aujourd’hui l’histoire de sa dynastie. 

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