Baden-Baden Septembre 2010: un monde pas pareil

15/09/2010 - Ventes & Shows
C'est un drôle d'endroit, l'Allemagne. Alors que le système courses va très mal à cause des "détournements de fonds" opérés par les bookmakers illégaux, les ventes publiques de Baden-Baden se portent plutôt bien. Comme la ville thermale, ici la vie semble s'écouler en dehors des troubles du monde.

 

Les ventes de Baden-Baden ont été crées en 1963 sous l'égide d'une association de grands élevages locaux, dont Schlenderhan, Rottgen ou autre Erverhorst, toujours bien actuels aujourd'hui. Mais historiquement, l'élevage Outre-Rhin fonctionne en autarcie. Ce n'est que depuis 10 ans que l'ouverture s'est vraiment effectuée, dans les 2 sens, c'est à dire avec des importations, des envois de juments aux étalons étrangers, mais aussi l'exportation de nombreux chevaux en France. De fait, les ventes publiques ont pris en même temps une autre dimension.

 

Les ventes de Baden-Baden de yearlings se déroulent durant 2 jours pendant la grande semaine des courses



Mais Baden-Baden reste un monde à part, et surtout bien différent de la France, grâce notamment à une forte demande intérieure. " Le propriétaire allemand a de l'argent" explique Jean-Pierre Carvalho, français installé entraîneur à Francfort après une belle carrière de jockey. " Mais il est très impliqué dans la gestion des chevaux. Comme on dit ici, celui qui paie choisit la musique."

Sylvain Vidal et plein d’autres français

Le couple franco-allemand est le ciment de l'Europe...Cela se prouve au bord du Rhin. En effet, de très nombreux français (ou professionnels installés dans l'hexagone) avait fait le déplacement pour acheter des chevaux: Alex Pantall, Jocelyn et Crispin de Moubray, Yannick Fouin, Jean-Luc Pelletan, Hervé Bunel, Antoine Lamotte d'Argy, Guy Chérel, François Belmont, Pierre Boulard, Julian Ince, Guillaume Macaire et Sylvain Vidal.

 

Sylvain Vidal a acquis 10 yearlings pour 587.000 €



Pierre Boulard et Guillaume sont des habitués. Ils viennent dénicher des futurs sauteurs dans les rangs des pur-sang allemands, garants de robustesse et de tenue. Ils avaient ainsi décelé avec les autres les talents de Lavirco ou Sholokov (père d'Allen Voran et Ole Companero). " Pendant longtemps ici, avant l'effondrement du système des courses qui a poussé les éleveurs à devoir vendre, les gens élevaient pour eux-mêmes. Ils étaient donc plus sélectifs sur les modèles et les caractères", explique Guillaume Macaire. "C'est un peu comme en France avant la 2e guerre mondiale et c'est ce que je recherche ici. Mais ça devient de plus en plus dur." Pierre Boulard a acheté pour lui 4 fils de Sholokov. Mais aussi 2 chevaux de plat, dont 1 neveu d'Hurricane Run par Authorized pour 20.000 €. " J'ai acheté ce cheval pour Alain Couétil. Il est "Fr" est moins cher ici qu'en France." Guy Chérel, l'Agence Fips, se sont aussi montrés actifs avec l'achat, mais c'est surtout Sylvain Vidal qui a été très présent avec l'achat de 10 lots pour un total de 587.000 €."

 

Guy Chérel en grande discussion avec Antoine Lamotte d'Argy et Guillaume Macaire à Baden-Baden


Les vendeurs sont très principalement allemands. Mais la France était représentée par le Haras du Petit Tellier, qui présentait 7 produits pour 5 vendus dont 1 fils de Desert Prince à Pierre Boulard. Celui-ci a donc fait l'aller-retour en camion, comme le n°21, un fils de Librettist présenté par Gestüt Burg Eberstein pour le compte du Haras du Logis (Julian Ince) où il a été élevé, et finalement acquis par Alex Pantall.

Tous ses chevaux ont été vendus pour des tarifs environnant les 20.000 euros. Cela correspond tant au prix médian qu'au prix moyen, quasiment égaux juste au dessus de 25.000 €. Ces 2 chiffres sont en augmentation d'environ 10%. En très légère baisse, le pourcentage de vendus reste particulièrement élevé (95,92 %). Le chiffre d'affaire a baissé de 5%, mais le catalogue lui-même avait sérieusement fondu en 1 an. Plafonné à 277 lots, il a été amputé de 44 éléments en 1 an.

 

Des tribunes bien garnies, surtout par des vendeurs et acheteurs locaux



Andreas Jacobs : "bientôt nous n’aurons plus que 200 chevaux au catalogue"

C'est une tendance qui pourrait d'ailleurs se confirmer, s'alarme le grand éleveur Andréas Jacobs, à la tête de l'historique Gestut Fahrhof (70 poulinières), plus deux haras en Angleterre (Newsells Park) et en Afrique du Sud qui abritent chacun 100 poulinières. Ce grand patron d'industrie est aussi le nouveau patron des courses de Baden-Baden. " La situation de courses en Allemagne est tellement critique que cela commence à se ressentir sur l'élevage. Nous sommes clairement obligés de vendre notre production, ce qui n'était pas le cas avant, pour moi y compris. Et les volumes de production diminuent progressivement. L'élevage a des cycles longs et cet état de fait n'est pas encore très visible, mais je pense que dans les prochaines années, nous ne pourrons pas présenter plus de 200 chevaux aux vente de sélection de septembre."

 

Andreas Jacobs, propriétaire de Gestut Fahrhof et nouveau patron des courses de Baden-Baden



Andréas Jacobs a présenté lui-même 24 produits sous la bannière de Gestut Fahrhof. Il a racheté puis vendu à l'amiable le n°21, magnifique fils de Manduro pour 100.000 € à Margot Herbert, et racheté pour 120.000 € un fils de Dansili. Il en a les moyens.

Pas d’anglais, ni d’irlandais, ni de Maktoum à l’horizon

Les ventes de Baden Baden n'ont pu aucunement compter sur les acheteurs "habituels" des ventes internationales, mis à part Sylvain Vidal. En effet, pas un seul achat anglais ou irlandais n'a été enregistré ! Quant à la famille Maktoum, qui n'a jamais très active à Baden mais souvent présente, John Ferguson et Angus Gold, agents des frères Mohammed et Maktoum sont venus mais repartis dans l'avion privé avant même le début de la 1e journée, sitôt vus les produits de leurs étalons...Increadible ! Comme quoi, il est possible de faire des ventes sans Coolmore ni Maktoum. Surprenant.

 

Des ventes sans acheteurs de Coolmore ou des Maktoum



Le top price au propriétaire de Night Magic

Et comme en plus, les temps sont finis pour le Baron Georg Von Ullman s'enflammait pour acheter les fils de Monsun pour 400.000 €, le top price ne crève pas le plafond: 170.000 € pour un poulain déjà nommé, El Galoppier. Présenté par Gestut Wittenkindshof, un haras situé près de Dortmund au centre du pays, c'était le seul fils au catalogue de Galileo, qui domine largement la situation mondiale sur les pistes et les rings en 2010. De plus, sa mère Elle Danzig était une championne, gagnante du Prix de Diane allemand entre autres. Magnifique, sculptural, placide, El Galoppier a la vrai tête du champion héritée de son grand-père Sadler's Wells. Il a un seul problème au niveau des aplombs antérieurs, un peu cagneux. L'enchère gagnante a été fournie par le courtier Dirk Eisele (BBA Germany), agissant pour le compte du grand industriel de la literie Hans Wernicke, présent à ses côtés. Ce passionné, qui a encore acquis 6 autres lots le lendemain, courait comme un fou 2 jours plus tard sur la piste pour rejoindre sa championne Night Magic, dénichée aux ventes en 2007, qui venait de s'imposer dans le Grosser Preis de Baden. Comme la vie est bien faite parfois.

 

Le top price à 170.000 €, un fils de Galileo et Elle Danzig, gagnante du Prix de Diane Allemand

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