Wissembourg et les mystères de l'Alsace des courses

02/07/2012 - Actualités
Depuis quelques années, Wissembourg nourrit un grand mystère...Comment en effet cet hippodrome de l'Est, méconnu en France, parvient non seulement à afficher des chiffres de fréquentations époustouflants mais aussi à servir de source de futurs champions internationaux ?

Le 1e mai et plus encore le lundi de Pentecôte, l'hippodrome de Wissembourg, situé dans le Nord de l'Alsace, à quelques centaines de mètres seulement de la frontière avec l'Allemagne, est envahi par milliers de spectateurs. On compte tous les ans de 3000 à 5000 entrées payantes...Ca fait rêver. Cette tradition date de bientôt 150 ans, lorsqu'à partir de 1864, suite au marché au chevaux de Wissembourg, les vendeurs et acheteurs faisaient des courses avec leurs traits légers. Depuis, c'est la grande fête du galop tous les ans car Wissembourg, vaste hippodrome au milieu de la forêt, propose des courses plates, des haies fixes et un steeple en huit.

 

Wissembourg, charmante ville typique. Dans ce décor de cinéma, on est en Alsace et nulle part ailleurs !



Et pour une raison inexplicable, mais notable, Wissembourg s'est revélé depuis quelques années comme une source de champions internationaux...de plat. En effet, en 2010, c'est issu ici que, quelques semaines après son achat aux ventes montées de Baden-Baden, la petite pouliche Danedream gagnait en débutant, un an avant de s'envoler dans le Prix de l'Arc de Triomphe. Mais ce n'est pas tout puisque au printemps 2011, French Fifteen y ouvrait son palmarès quelques mois seulement avant de remporter le Critérium International (Gr.1) à Saint-Cloud.

 

Familial et populaire...l'Alsace révèle une culture cheval insoupçonnée de l'extérieur.

 

Les slows allemands du bal populaire


Pour la 1e fois cette année, Wissembourg organisait une 4e réunion annuelle, le samedi 30 juin en semi-nocturne avec marché du terroir et bal populaire le soir. Il faudra que ce rendez-vous rentre dans les habitudes et l'hippodrome n'était pas comble comme d'habitude, mais le bal du soir était plein, avec des slows chantés en allemand et le must des morceaux folkoriques qui ne laissaient aucun doute sur la localisation de la fête !

 

Le midi, des allemands paradent dans la ville en enfourchant leur fougueux tracteurs de collection. Rigolo non ?

 

Rapideur va-t-il poursuivre le mythe wissembourgeois ?


Et il se pourrait même que le gagnant de la course des 2 ans entretienne le nouveau mythe de Wissembourg quant à sa source de champions. En effet, le débutant Rapideur, magnifique et placide fils d'Elusive City acquis 18.000 yearling à Deauville par l'allemand Sacha Smrczek, s'est imposé dans un style impressionnant. Cet animal sort de l'ordinaire. Son jockey Daniele Porcu, italien installé en Allemagne, était sûr de gagner et a pris d'emblée la tête, pour assurer. " Hier, je montais à Hambourg et j'ai conduis 600 kms pour débuter Rapideur ici à Wissembourg. Il travaille très bien le matin et je sais qu'il a la pointure black-type sans problème..."

 

Rapideur est une peinture rapide...



Entrainé Outre-Rhin, Rapideur a été élevé par un allemand mais en Normandie au Haras de la Perelle, chez Jurgen Winter. Ce dernier avait acquis la mère Perelada, une petite-fille de Pharma (1e Gr.1 aux USA), de la famille d'English Channel pour la forte somme de 145.000 € à Deauville en août 2007. Mais cette fille de Montjeu s'est accidentée peu après et a été saillie dès l'âge de 2 ans par Elusive City. Ces derniers temps, le papier n'a pas trop bougé. Jurgen Winter a revendu Perelada pour 21.000 € seulement en décembre 2011, pourtant pleine de King's Best. Son 1e produit par Elusive City avait donc été vendu pour 18.000 €, et il semble désormais très bon !

 

Daniele Porcu était redescendu de Hambourg dans la nuit exprès pour monter Rapideur, un 2 ans qu'il estime énormément.

 

Le Prix France Sire pour le propriétaire de Danedream


Lorsque Danedream a débuté à Wissembourg, son propriétaire Heiko Wolz était parti voir un autre partant à Milan. Pourtant, il adore Wissembourg et habite d'ailleurs tout près de Baden-Baden, juste de l'autre côté de la frontière. Ce 30 juin, Heiko Wolz était bien présent pour suivre son 3 ans Querrentino, sujet estimé qui a gagné en tirant dessus sur les 2400 m du Prix France Sire ! " Je suis sûr qu'on pourrait gagner un quinté mais il ne faut pas que le handicapeur soit trop méchant !" Ce beau cheval bai brun est issu de la 1e génération de Soldier Hollow, qui s'annonçait déjà comme le nouvel étalon en vogue Outre-Rhin, la veille du succès de son fils Pastorius dans le Derby Allemand.

 

Arnaud Poirier (à droite), remet le Prix France Sire au jockey Lennart Hammer-Hansen et au propriétaire Heiko Wolz (polo rose), qui possède également Danedream.

Hommage à Nicolas Dieu


L'Alsace est un pays de coeur. Les hommes du crû s'étaient beaucoup attachés à Nicolas Dieu, jeune jockey de chez Marcel Rolland qui faisait toujours le déplacement à Wissembourg, au point d'être considéré comme un local. Malheureusement, il a perdu la vie lors d'un accident de voiture de retour d'Allemagne il y 2 ans. Et pour la 1e fois, le comité a décidé de lui rendre hommage dans la course de haies, le Prix Nicolas Dieu. C'est encore un allemand qui s'est imposé, l'entraîneur Mirek Rulec, installé à Baden-Baden, passionné d'obstacle, qui vient constamment en France pour courir. Il a gagné en débutant avec Kellemoi de Pepita, fille d'Hawk Wing, très bonne 2 ans de nouveau black-type à 2 ans mais décevante à 3 ans. " Je l'ai acheté seulement 8.500 € en mai aux ventes de Baden-Baden, il y a 6 semaines. Elle a depuis repris beaucoup de poids et elle est douée pour l'obstacle car encore très tendue comme une pouliche de plat."

 

Débutant en obstacle, Kellemoi de Pepita (casaque rose - Mike Marsac) devance de haute lutte La Boissière au centre, entrainée par Nicolas Bertran de Balanda, et Desroches à la corde. La française est donc entourée de 2 sauteurs allemands.

 

Les allemands savent encore sauter

 

Juste avant son achat, cette pouliche avait retrouvé le chemin de la victoireà Bremen sur 1400 m dans un prix offrant une allocation globale de...2000 € ! Elevée par Newsells Park, le grandiose haras anglais d'Andreas Jacobs, cette petite nièce de la crack américaine Personnel Ensign avait couté 8.000 € yearling à Baden-Baden et avait de fait pris des grosses allocations dans les courses réservées 2 ans issus des ventes pour lesquelles elle était qualifiée, mais qui ne sont pas dotées du label black-type. Elle a pris 54.000 € à 2 ans, une somme énorme Outre-Rhin. Bien dressée en peu de temps par Mirek Rulec, entraineur installé à Baden-Baden mais qui ne court quasiment qu'en France, où cet ancien jockey d'obstacle peut exprimer sa passion pour la discipline, elle a pris 6.240 €. L'herbe est beaucoup plus verte en France que de l'autre côté du Rhin. A la fin de la réunion, le score était de 4-3 pour l'Allemagne.

 

Autour de Kellemoi de Pepita, l'entraineur Mirek Rulec (à gauche) est venu rejoindre les propriétaires et le jockey Mike Marsac.

Obelisk, il est vraiment trop fort

Enfin, pour l'anecdote, un cheval âgé de 10 ans et nommé Obelisk a remporté son 5e succès de l'année ! Il reste de fait invaincu en 2012, lui qui court le cachet dans les plus petites courses d'Allemagne, de Belgique et de France. Ce fils de Chester House s'est baladé dans le réclamer pour gentleman, monté par Mark Gier. Et malgré son âge canonique, lui qui était proposé à 7.000 € a suscité une véritable furie près de la boite des réclamations. Son entourage a réussi à conserver le papy à la maison. Il y a bien eu un bulletin plus élevé, mais l'enchérisseur a oublié de remplir le talon...Aussi neuneu qu'un romain.

Obelisk remporte en se tordant de rire le 5e succès de l'année. Il a 10 ans !

Voir aussi...