Elusive Kate : le retour de la vieille Amérique triomphante

30/07/2012 - Grand Destin
Comme à la belle époque de l'âge d'or deauvillais, l'Amérique s'impose sur la côte Normande avec Elusive Kate dans le Prix Rothschild (Gr.1). Les Etats-Unis peuvent se montrer très traditionnels, parfois...

Les pur-sang aiment bien faire tourner en bourique les théoriciens. Ainsi, quelques jours seulement après la publication sur France Sire d'une analyse sur le déclin de l'empire équin américain, tellement gangréné par les effets du doping que les propriétaires veulent s'attaquer à leur cancer de front (lire l'article), une pouliche purement "yankee" remporte le 1e Gr.1 du meeting deauvillais, le Prix Rothschild, dans l'ère post-Goldikova qui venait s'y aligner 4 succès consécutifs.

Elusive Kate adore tant la France qu'elle y avait remporté l'an dernier 3 succès consécutifs, les Prix Six Perfections (Listed) et du Calvados (Gr.3) à Deauville avant de décrocher la timbale à Longchamp dans le Prix Marcel Boussac (Gr.1).

 

Sous la casaque japonaise Yoshida portée par William Buick, entrainée en Angleterre, Elusive Kate est en fait une américaine pur sucre. (PHOTO APRH)



Certes entrainée en Angleterre par un John Gosden qui a longtemps exercé outre-Atlantique, cette pouliche de 3 ans est américaine jusqu'au bout des ongles. Elevée à clovelly Farm, à Lexington dans le Kentucky, elle est né d'Elusive Quality, étalon révélé au haras après une carrière de course discrète, qui s'impose aujourd'hui comme un des meilleurs continuateurs de Mr Prospector en ligne mâle, à travers son remarquable auteur Gone West. A noter que son père de mère, Hero's Honor (Northern Dancer), a en revanche fini sa vie assez ratée en France.

Son père de mère Lemon Drop Kid (frère d'AP Indy par Kingmambo) est pur produit du système de sélection américain, puisque vainqueur des Futurity Stakes (Gr.1) à 2 ans puis de la 3e étape de la triple couronne (Belmont Stakes, Gr.1) à 3 ans.

 

Sous la casaque américaine de Magnolia Racing, appartenant aux anciens propriétaires de Stonerside Stable, Elusive Kate avant remporté le Prix Marcel Boussac en 2011 à Longchamp.



Elle rappelle donc les grandes années qui ont fait la légende de Deauville avec ses riches industriels américains de la 1e moitié du 20e siècle, comme Dupont de  Nemour (inventeur du Nylon) qui venaient passer 2 mois en famille sur la côte Normande. Cette venue magique des "américains", qui mettaient des chevaux à l'entrainement en France pour le simple plaisir de les voir courir à Deauville en août, et dont les entraineurs préparaient soigneusement une victoire juste avant les ventes de yearlings, a perduré à plein jusque dans les années 80. Et en voici une résurgence.

En effet, avant d'être acquise par Teruya Yoshida, la magna des courses japonaises qui investit toujours en masse sur des bonnes pouliches dont il est garanti de vendre pour une fortune les 3 premiers yearlings chez lui en vente publique, Elusive Kate appartenait à Magnolia Racing, c'est à dire un couple de milliardaires américains : Robert et Janice McNair. Industriels de l'énergie thermique, propriétaires des Houston Texans (grande équipe de football américain), les McNair avaient pris la pouliche juste après avoir cédé à Cheikh Mohammed Al Maktoum en 2008, 14 ans après sa création, leur immense haras du Kentucky, Stonerside Stable à Paris (1000 hectares en plus un centre d'entrainement à Saratoga), avec les 250 chevaux de l'écurie...

 

Après avoir remporté le Prix Morny à 2 ans en 1985, Regal State est devenue mère du champion Pleasantly Perfect, et grand-mère d'Elusive Kate.



Elusive Kate a été élevée par un voisin, Robin Scully, qui a lui fait fortune à Clovelly Oil and Gas, dans l'exploitation de pétrole et de la gaz à la Nouvelle-Orléans, ce qui lui a permis de monter à partir de 1959 son haras dans le Kentucky, Clovelly Farms, une "petite fermette" de 310 hectares seulement...dans le style des images d'épinal des haras américains.

Scully a toujours été amoureux de la France et de Deauville en particulier. Sa propre casaque, confiée à John Fellows, y a établit un record grâce à Cricket Ball, quadruple vainqeur du Prix de Meautry (Gr.3). Scully a aussi remporté 3 fois le Prix Morny (Gr.1) en 6 ans, avec Ancient Regime (1980) puis les 2 soeurs Seven Springs (1984) et Regal State (1985). Que des chevaux élevés aux SA. Il avait massivement investi pour acheter leur mère française, La Trinité (Lyphard), placée de Groupe et Listed, pour 1,350.000 francs en fin d'année de 3 ans.

 

Elusive Kate a été élevée dans un haras typique de la grande tradition américaine, à Clovelly Farms dans le Kentucky, chez Robin Scully.



Mais cette somme a été centuplée. Ainsi Regal State, pourtant par le décevant Affirmed, est devenue une poulinière de base de son élevage, mère du richissime Pleasantly Perfect (Pleasant Colony), l'auteur du doublé Breeders'Cup Classic / Dubaï World Cup qui a porté sa fortune à 7,8 millions de dollars ! Généreuse, Regal State a aussi donné naissance à Hurricane State (Miswaki), gagnant du Prix Eclipse (Gr.3) puis étalon en Inde, à Swagger Stick (Cozzene), un grand champion...de steeple-chase aux USA, puis quasiment en fin de carrière à une certaine Gout de Terroir (Lemon Drop Kid), gagnante d'une seul course, mais devenue mère de...Elusive Kate !

Robin Scully a vendu son effectif à Keeneland en 2010 puis son haras de Clovelly en décembre 2012. A Deauville, il était une fois l'Amérique, plus celle de Robert de Niro que Justin Bieber.

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