Mais qui a bien pu nous mettre une telle pâtée à la Breeders'Cup 2011 ?

08/11/2011 - Evénements
C'est ce qu'on appelle prendre une tôle, une veste ou une pâtée, pour rester poli. La délégation française forte de 6 concurrents et emmenée par la reine des courses Goldikova n'a cessé de prendre des coups de marteaux sur la tête lors du week-end de la Breeders'Cup 2011 à Churchills Downs. Mais qui sont les chevaux et les hommes qui ont gagné sans débat ni polémique. Car ils ont gagné donc sont les meilleurs à ce moment et à cette place, sans avoir besoin de longs palabres.

Stephanie's Kitten et les joies des vieilles traditions américaines

Déroulons le film dans l'ordre chronologique. Le combat a commencé avec Dear Lavinia, montée par un Christophe Lemaire tout auréolé de son exploit dans la Melbourne Cup avec Dunaden. Née dans le Kentucky, la fille de Grand Slam revient sans doute au pays pour y poursuivre sa carrière après une très bonne saison de 2 ans, ponctuée par une 2e place dans le Critérium de l'Ouest (Listed) à Craon derrière French Fifteen et une victoire dans le Critérium de Bordeaux (Listed). la pensionnaire de Jean-Claude Rouget finit dernière...non loin derrière la favorite anglaise Elusive Kate (8e), pourtant auréolée de son succès dans le Prix Marcel Boussac (Gr.1). La gagnante Stephanie's Kitten a été élevée dans l'Illinois au nord des Etats-Unis par Kenneth et Sarah Ramsey, qui l'ont conservé sous leurs couleurs. ces vieux éleveurs traditionnels avait également eu son père Kitten's Joy, qui fait la monte pour 26chez eux à Ramsey Farm après une excellente carrière sur le gazon (1e Secretariat Stakes, 2e Breeders'Cup Turf, 2e Arlington Million). Il a sans doute transmis l'adaptabilité au turf à sa fille Stephanie's Kitten, qui arrivait directement d'un succès de Gr.1 sur les 1000 m en sable de Keeneland, et dont la grand-mère Bail Out Becky était déjà très bonne (1e Del Mar Oaks, Gr.1). Ramsey Farm s'étend sur plus de 500 hectares dans le Kentucky. Ces terres historiques ont vu la naissance dans les années 40 de Greyhound, devenu un chef de race dans le monde du trot.

Stephanie's Kitten (John Velazquez) remporte la Juvenile Fillies'Turf (PHOTOS ALEXANDRA LOMBARD)



Filly and Mare Turf : Perfect Shirl bat Nahrain et...une non partante.

La Filly and Mare Turf est une course qui souri aux françaises. Sous la même casaque et le même entrainement que Banks Hill et Intercontinental, déjà lauréates de cette épreuve, Announce n'aura même pas la chance de participer. La gagnante du Prix Romanet (Gr.1) cet été à Deauville, un peu nerveuse, a frotté le rail et un camion en se rendant au départ. " J'ai entendu le vétérinaire dire qu'il n'était pas content après le 6" explique Ryan Moore qui montait lui Misty for Me. J'ai prévenu Maxime qui n'avait pas entendu d'aller les voir." Maxime Guyon est resté interloqué. " Je suis arrivé près du véto qui m'a dit que la jument s'était fait une ouverture au jarret, qu'elle était boiteuse et qu'elle ne courait pas. Je n'ai même pas eu la chance de discuter !"

 

Perfect Shirl (John Velazquez) s'impose dans la Filly and Mare Turf devant Nahrain et Aruna.
 


La favorite de la course était l'ex-française Stacélita, née au pays chez Jean-Pierre Dubois, gagnante du Prix de Diane 2009 chez Jean-Claude Rouget et parti aux Etats-Unis cet été. Mais après un bon parcours, elle est restée sans réaction. Acquise pour moitié par Teruya Yoshida à Martin Schwartz, la fille de Monsun partira sans doute au Japon. Elle qui avait arraché d'un nez le Prix de l'Opéra à Announce, l'anglais Nahrain a pris l'avantage avec Frankie Dettori, mais n'a rien pu contre le finish de Perfect Shirl, montée comme Stephanie's Kitten par John Velazquez. Elle n'avait pas gagné une course depuis un Gr.2 en juillet 2010. Elle aussi a été conservée par son éleveur Charles E. Fipke, qui a aussi élevé et fait courir son père. Ce Perfect Soul est un des rares fils de Sadler's'Wells qui ait accompli toute sa carrière Outre-Atlantique, en l'occurrenc au Canada où il a été le meilleur spécialiste du gazon de son temps. Egalement vainqueur du Keeneland Turf Mile (Gr.1), il fait la monte dans le Kentucky, à Dan Darby Farm, à 15.000 $.

 

Marathon : les américains se mettent aux longues distances



Brigantin avait terminé 3e de la Gold Cup d'Ascot et du Prix du cadran cette année. Il avait battu au printemps Dunaden, nouveau héros international, mais aussi son dauphin anglais Red Cadeaux. Autant dire que le pensionnaire d'André Fabre avait une toute 1e chance au départ de la Breeders'Cup Marathon (Gr.2) sur 2800 m. Le seul "hic" est que la course se dispute sur la piste en dirt. Et Brigantin n'a pas apprécié la suprise. Il a passé la course avec 10 longueurs de retard. Il finit dernier, devant l'autre européen Harrison's Cave, présenté par Aidan O'Brien. Preuve que les américains savent aussi faire des longues distances. Le gagnant est encore un outsider à 42/1, le gris presque blanc Afleet Again, monté par Cornélio Velasquez. Gagnant de Gr.3 sur 1700 m à 3 ans, il n'avait pas fait grand chose cette saison à 4 ans, mais s'est visiblement découvert une vocation pour son 1e essai sur 2800 m. Son père Afleet Alex (Northern Afleet) a été le champion des Etats-Unis en 2005. Il manqué la triple couronne de peu, ayant gagné les Preakness Stakes et la Belmont Stakes mais ayant terminé 3e de la 1e étape, le Kentucky Derby, à 1 longueur seulement du gagnant Giacomo. C'est aujourd'hui un jeune étalon très en vue aux Etats-Unis, installé au Etats-Unis à 25.000 $. La mère Lucky Again n'avait fait avant Afleet Again que des bons chevaux, mais pas à un tel niveau. C'est une fille de Wild Again, le vainqueur de la toute 1e Breeders'Cup Classic 1984 à Hollywood Park, déjà à la grosse cote de 31/1.

 

Le tout blanc Afleet Again (Cornelio Velazquez) fait bingo pour son 1e essai sur 2800 m


Le Turf pour l'Europe, mais pas pour la France !


Rien ne semblait devoir empêcher Sarafina de remporter la Breeders'Cup Turf 2011. Mais elle s'est révélée être son propre ennemi. " En France, quand il n'y a pas de train, on "tend l'élastique" dans le parcours et on lâche tout dans les 400 derniers mètres. Mais sur des vraies courses sélectives, on se rend compte que Sarafina ne tient pas la distance de 2400 m" explique son jockey Christophe Lemaire. "Il ne faut pas chercher plus loin la raison pour laquelle nous avons terminé seulement 7e de l'Arc. Elle y court bien, mais coince pour finir, comme ici à Churchill Downs, ou en plus de cela elle a tiré dans le parcours." L'affaire est donc pliée en une explication limpide, et Sarafina termine 4e, devant laisser filer dans la ligne droite l'américain Brilliant Speed (fils du vieux mais incontournable Dynaformer), l'anglais Sea Moon (Beat Hollow) et surtout le vainqueur irlandais St Nicholas Abbey, entrainé par Aidan O'Brien et monté par son fils Joseph, 18 ans, dans une ambiance d'immense joie familliale, devant ses parents et ses quatre soeurs cadettes.

Monté par Joseph O'Brien, qui devient à 18 ans le plus jeune vainqueur de l'histoire de la Breeders'Cup, St Nicholas Abbey devant Sea Moon (liste en tête) et Brilliant Speed (casaque à poids rouges) tandis que Sarafina, en casaque Aga Khan, termine 4e.



Fils de Montjeu avec une soeur de Ballingarry, Starborough et Aristotle, mais par le décevant Sure Blade, avait été présenté comme un phénomène à 2 ans après son envolée dans le Racingpost Trophy (Gr.1) à Doncaster. Mais il est passé à travers sa campagne de 3 ans. 3e des King George d'Ascot cet été, il retrouve finalement ses sensations et conclut en beauté une année de rêve pour son père Montjeu.

 

Goldikova perd sa couronne du mile, face à Court Vision, qui n'était pas un inconnu malgré ses 64/1


Ah misère...La reine des courses Goldikova ne termine que 3e dans la Breeders'Cup Mile qu'elle venait de remporter à 3 reprises consécutives. Julien Leparoux a cru avoir gagné au passage du poteau en selle sur le 4 ans gris Turallure. Ce dernier a une origine totalement exotique aux yeux des français. Son père Wando (Langhfur) a été le cheval de l'année au Canada en 2003 y fait la monte à 3.500 $ canadiens à Schonberg Farm dans l'Ontario. Le père de mère, Wekiva Springs, est un autre mystère. Ce fils de Runaway Groom a 20 ans et fait le monte en Floride pour la somme de...1000 $ ! Mais attention, l'arrière grand-mère de Turallure est Parioli, une championne sur le sprint français dans les années 80.

 


Le bai-brun Court Vision (Robby Albarado) arrache la victoire d'un nez à Turallure (Julien Leparoux) tandis que Goldikova (masquée à la corde) conserve la 3e place.



Turallure était le principal challenger annoncé face à Goldikova, mais il a été battu d'un nez par un énorme outsider à 64/1 : Court Vision. Mais à l'âge de 6 ans, celui-ci ne tombe pas du ciel, ayant gagné 2 groupes à 2 ans puis au moins 1 Gr.1 sur gazon 3, 4 et 5 ans. Cette cote s'explique par le fait qu'il n'avait rien réussi de bon depuis son succès dans le Woodbine Mile (Gr.1) en septembre 2010. Court Vision honore les grands noms traditionnels de l'élevage dans le Kentucky. Il a été élevé par William Parish, ancien ambassadeur des Etats-Unis en Angleterre, aujourd'hui tout puissant patron du grand haras de Lane's End Farm où stationnent Smart Strike, Lemon Drop Kid et autre Curlin. Il appartient à Waygne Hughes, qui est lui le propriétaire de Spendthrisft Farm, autre grand haras historique des environs de Lexington où stationnent actuellement 11 étalons dont Malibu Moon.

Court Vision est fils d'un étalon tête de liste, Gulch (Mr Prospector), ancien vainqueur de Breeders'Cup Sprint, aujourd'hui retraité à l'âge de 27 ans. Son origine maternelle est exceptionnelle, puisque la mère Weekend Storm est une soeur par Storm Bird de 2 champions: AP Indy et Summer Squall.

Pour revivre les 2 jours de la Breeders'Cup depuis l'hippodrome de Churchill Downs (cliquez ici)

 

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