L'appétit jamais rassasié de Darley

14/06/2009 - Focus Elevage
Darley vient d’acheter Medaglia d’Oro, un jeune étalon américain prometteur. L’occasion de faire un point  ou plutôt tenter de faire un point  sur la présence tentaculaire des forces de Dubaï dans les courses. Et de parler de ses réussites et  nombreux  échecs. .


L’annonce du récent achat du jeune étalon américain Medaglia d’Oro par Darley, la signature dans les courses de Cheikh Mohammed Al Maktoum, inspire plusieurs lectures aux sentiments opposés. D’abord Medaglia d’Oro, un petit-fils de Sadler’s Wells par l’intermédiaire d’El Prado, se présente un réel espoir du parc d’étalons américain. Sa première promotion n’a que 3 ans et il est le leader des étalons US entrés en 2005. Il est surtout le père de la phénoménale Rachel Alexandra, détentrice d’un doublé jamais réalisé auparavant : les Kentucky Oaks (l’équivalent, pour les seules pouliches, du fameux Kentucky Derby) et les Preakness Stakes. Dans le premier, elle a été tellement époustouflante qu’elle a établi le nouveau record du plus grand écart à l’arrivée : 20 longueurs 1/4 ! Le temps enregistré sur les 1.811m (1 mile 1/8e) était aussi un des plus rapides de tous les temps, en 1’48’’87. Dans les Preakness Stakes, contre les mâles, elle a pris le leadership des 3 ans, matant le lauréat du Kentucky Derby, Mine That Bird ! De telles performances font tourner la tête et John Ferguson, le conseiller ès affaires hippiques de Cheikh Mohammed, a ensuite fait acheter le père de la phénomène. Il faut dire que la production globale du jeune sire sort de l’ordinaire avec 7 gagnants black-types et de 6 autres placés de courses principales, dont Payton d’Oro, vainqueur de courses de Groupe 2 et de Groupe 3.
L’étalon était déjà dans les "petits papiers" du dignitaire dubaïen. Il s’était rendu acquéreur, cette année, du plus cher fils de Medaglia d’Oro en vente publique pour 1,6 million de dollars…

 

Medaglia d’Oro

 


Les opérations commandos de Darley
Cet achat remet sur le devant de la scène les opérations commandos de Darley pour acquérir ce qu’il y a de mieux sur la planète "Turf". Tant en course qu’en élevage. Les tops 2 ans américains passent régulièrement sous la bannière Godolphin, la marque familiale des Maktoum. Ce fut le cas de Midshipman l’an dernier (après sa victoire dans la Breeders’ Cup Juvenile). En Europe, les français Chock a Block et Tynedale ont fait de même. Le problème est que les achats ne sont que très rarement transformés sur la piste : Midshipman s’est blessé l’hiver dernier, Chock a Block est devenu un poulain commun et Tynedale n’a plus reparu. Parmi les chevaux d’âge, les fiascos sont aussi très nombreux. Literato a perdu toute sa superbe une fois passée sous les couleurs bleu roi. L’exception récente de New Approach – mais laissé à l’entraînement chez Jim Bolger – ne peut, à lui seul, faire oublier les descentes aux enfers.

 

New Approach

 


Les échecs éclipsent les réussites
On a coutume de dire que quelques beaux succès suffisent à faire oublier les échecs, même nombreux, pour un entrepreneur "lambda". Ceci n’est pas vrai pour Darley. Dans ce cas, la débauche des moyens – et des énergies qui vont avec – ne laissent plutôt pas de surprendre par ses échecs surnuméraires qui éclipsent, de loin, les rares réussites.
Dans le domaine de l’élevage, les investissements de Darley ont aussi été énormes. En Europe, on se souvient de Tiger Hill, entré dans le parc des étalons après les débuts prometteurs de sa production. Depuis, c’est le calme plat.
A contrario, Noverre, un frère d’Arazi, était un étalon Godolphin à ses débuts. Il vient de donner avec Le Havre, le gagnant du Prix du Jockey Club. Peut-être trop tard pour lui car il a été cédé au début de l’année 2008 à des investisseurs indiens. Il fonctionne dorénavant à Sohna Stud Farm, à 100 kilomètres de New Delhi !
Aux Etats-Unis, le pool d’étalons obtient plus de réussite au gré d’investissements massifs. Les Bernardini, Elusive Quality et autres Cherokee Run sont efficaces et "dans le vent". Le jeune étalon Street Sense (gagnant du Kentucky Derby en 2007), acquis à prix d’or, est attendu au tournant. D’autant plus qu’il met en avant la vraie et rare réussite d’un étalon Darley "natif" : Street Cry. On peut relever pour l’anecdote que ce lauréat de la Dubaï World Cup (Gr1) a une ascendance française avec une grand-mère qui n’a couru qu’en France, en plus d’être "FR".

 

Cheikh Mohammed Al Maktoum


Un soutien à l’économie mondiale
Mais les investissements de Cheikh Mohammed débordent très généreusement des simples achats de chevaux. Ils sont nettement plus globaux avec l’acquisition permanente de grands haras américains et, de manière exceptionnelle, du plus grand ensemble d’élevage australien en 2008 (Woodlands Stud pour 415 millions de dollars US). Oui, mais… l’appétit dubaïen est encore plus grand. En 2008, Synergy Investments, une société de Dubaï piloté par Cheikh Mohammed, prend le contrôle de Fasig Tipton, la plus ancienne société de vente américaine. Aujourd’hui, Dan Pride, un homme de Darley, est à la tête de l’organisme de vente.

 

 

Woodlands Stud en Australie

 


Acteur des courses à tous les échelons, tous les niveaux
C’est dans ce contexte qu’il faut replacer l’achat de Medaglia d’Oro. Une petite vague dans un océan économique. L’appétit de Darley est énorme mais conditionne aujourd’hui une bonne part de l’économie mondiale. Une influence qui se mesure à tous les niveaux, y compris dans le programme français où les étalons Darley et les effectifs de la famille de Dubaï évoluent sans réserve. Comme partout dans le monde.

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