Ming Dynasty : hommage à Madelia et son Prix de Diane sur trois jambes

26/08/2015 - Grand Destin
Ming Dynasty, le vainqueur du Grand Prix de Clairefontaine 2015, n’est autre qu’un descendant de l’héroïque Madelia, qui avait gagné le Prix de Diane sous la même casaque Wildenstein alors qu'elle souffrait d'une fracture survenue à 100 m de l'arrivée.


Ming Dynasty remporte le Grand Prix de Clairefontaine 2015, sous la selle d'Umberto Rispoli qui porte la casaque Wildenstein. (photos APRH)

 

Ming Dynasty, le fils de King’s Best et de Memoire (Sadlers’S Wells), à l’entrainement chez Mikel Delzangles, est la propriété de Wildenstein Stables (entité de David Wildenstein, fils de Guy, donc petit-fils de Daniel). Inédit à 2 ans, il a débuté victorieusement à Maisons-Laffitte en avril puis à repris le chemin de la victoire trois mois plus tard (fin juillet) à Clairefontaine dans une «B». Il confirme, en cette fin août, tout le bien que son entourage pensait de lui, puisqu’il possède des engagements dans l’Arc et le Preis von Europa

 


Alec Waugh (Jedburgh Stud) vient féliciter Ming Dynasty. Il s'occupe depuis longtemps de l'élevage Wildenstein en France au Haras du Bois Roussel et a acheté la mère, Mémoire, à Deauville.

 

Invaincu comme l’était son arrière grand-mère, Madelia

Son arrière grand-mère, Madelia (Caro) n’avait débuté qu’en avril de ses 3 ans à Saint-Cloud en 1977. Une promenade de santé sur les 1.600 m. de la piste clodoaldienne puis son entraineur, Angel Penna, n’hésite pas à prendre le chemin de Longchamp pour la Poule d’Essai dès sa 2e sortie !. La victoire est au bout venant des derniers rangs. Dans un canter et à l’issue d’une ligne droite époustouflante, elle règle ses deux dauphines, deux filles de Lyphard, qui n’ont pu se départager, Beaune (future mère de Bering) et Durtal (propriété de Robert Sangster, élevée par l’Ecurie Aland).
 
 

Alors qu'elle était partie pour gagner dans un canter, Madelia est victime d'une fracture à 100 m de l'arrivée et résiste d'une tête au retour de Trillion dans le Prix de Diane 1977.


La championne se dérobe mais gagne le Prix de Diane.
 
La fille de Caro est de nouveau en piste à Longchamp 3 semaines plus tard pour le Prix Saint-Alary dans lequel elle domine Beaune, de nouveau et une certaine Sanedtki, pensionnaire d’Olivier Douieb. Le Prix de Diane lui tend les «bras» mais la route menant en haut de la piste de Chantilly aurait très bien pu très mal se terminer. Yves Saint-Martin est le jockey de Madelia, comme lors de ses précédentes sorties, ce qui est normal vu son contrat avec Daniel Wildenstein,
 
" J’ai souvent monté des chevaux généreux, d’un courage à toute épreuve, mais une seule fois une jument héroïque. Le mot n’est pas trop faible. Et de plus, une championne. Une de mes adversaires, Trillion (NDLR : inédite à 2 ans et invaincue à 3 ans sous la coupe de François Mathet, l’aïeule d’une certaine Treve), était capable d’assurer un train soutenu du départ à l’arrivée sans jamais faiblir. Ce qu’elle a fait dès l’ouverture des boites. Connaissant les énormes moyens de ma partenaire, je l’ai maintenue au sein du peloton, jusqu’à l’entrée de la ligne droite. Dans le bas de la montée, à mon premier appel, Madelia est venue facilement sur Trillion (montée par Gérard Dubroeucq) et lui a pris trois longueurs.
Elle allait par-dessus le lot, donnant l’impression qu’elle allait gagner de loin quand, brusquement, à 100 mètres du poteau, sans raison apparente, elle se met à pencher à gauche, puis à verser complètement, à dérober, traversant la piste vers la grille du pesage.
 
Croyant qu’elle me faisait un caprice, je lui donne un coup de cravache du côté où elle penchait pour tenter de la remettre dans le droit chemin. Fâchée, la voilà qui verse brutalement de l’autre côté, vers Trillion, qui, pendant que nous zigzaguions, avait regagné du terrain à la corde.
 
J’entrevoyais la catastrophe ; si elle ne se ressaisissait pas, elle allait percuter Trillion. Je ne pouvais plus la contrôler mais seulement essayer de la maintenir aussi droite que possible, en priant le ciel d’atteindre le poteau avant que Trillion ne vienne nous battre.
 
Heureusement, ce poteau n’était pas loin et nous avons pu garder une tête d’avance. En la sentant titubante, j’ai tout de suite compris. C’était grave.
 
Elle fut immédiatement transportée à la clinique vétérinaire où les radiographies décelèrent une fracture parcellaire de la face externe du canon gauche. Le lendemain, le Docteur Pouret l’opérait avec succès et lui retirait trois petits morceaux d’os brisés. Elle ne reverrait plus jamais un champ de courses, mais elle était sauvée pour l’élevage.
(extrait tiré du livre d’Yves Saint-Martin, Au Galop !).
 
 

Yves Saint-Martin peut pousser un ouf de soulagement après le Prix de Diane, mais la championne invaincue, victime d'une fracture, quittera la scène invaincue en 4 sorties, après son triplé Poule d'Essai - Saint-Alary - Diane.
 
 
Quatre black-types consécutifs.
 
Daniel Wildenstein avait acheté la mère de Madelia, Moonmadness (élevée par la famille Whitney à Greentree Stud dans le Kentucky) en 1970, pleine de Bold Bidder. Le foal à naître l’année suivante va s’appeler Mount Hagen suivi de Monsanto (Breton), de Malecite (Fin Bon) et de Madelia en 1974. Tous les quatre vont gagner ou être placés de Gr.1 pour la casaque bleue, toque bleu-clair. Le 5e foal, Martingale (Luthier) va donner naissance à et à Mersey (Crystal Palace), gagnante du Prix Royal-Oak 1985 et à Muncie (Sadler’s Wells), gagnante du Prix Saint-Alary 1995.
 
Pour sa part, Madelia, qui avait été sauvée, donnera naissance à Claude Monet (Affirmed), à Marignan et surtout à Moonlight Dance (Alysheba), gagnante du Prix Saint-Alary et future mère de Millionaia (Peinte Célèbre), seconde du Prix de Diane.
  
 
Ming Dynasty est le seul black-type de sa mère, Memoire (Sadler’s Wells et Moonlight Dance), pour son 9e produit. Cette mémoire a été une poulinière très décevante, n'ayant donné jusqu'alors que 2 autres vainqueurs de niveau moyen, Moscow  Nights (Peintre Célèbre) et Montagne Lointaine (Numerous). Elle a été vendue avant les débuts de son rejeton Ming Dynasty, à Deauville pour 8.500 €, pleine de Kendargent, par Paul Nataf pour I. Corbani et Jedburgh Stud, c'est à dire Alec Waugh qui travaille pour la famille Wildenstein depuis des lustres. Ils ont fait naître en 2013 un mâle, nommé Kenlight (vendu yearling à Guy Pariente pour 37.000 €) et en 2015 un mâle de Siyouni.
 
NOTES :
 

Madelia était entrainée par l’argentin Angel Penna (dit « le sorcier ») qui avait débarqué en France en 1972 pour la Comtesse Margrit Batthyany emmenant dans ses valises le jockey franco-américain Jean Cruguet. Angel, dit Junior, remplace le hongrois Albert Klimscha qui était en poste depuis 1965. Albert prendra sous sa responsabilité une bonne partie des effectifs Wildenstein (dont Allez France à 2 ans) avant de passer la main.....à Angel Penna (qui mènera à la victoire Allez France dans l’Arc 1974).

Il ne faut pas confondre le 3 ans français Ming Dynasty avec son homonyme irlandais né en 1991 mais bien connu en France pour y avoir fait toute sa carrière sous la férule de David Smaga, Thierry Foulon puis E. Savy-Julien. Cet insuable spécialiste des handicaps a couru 90 fois pour 11 victoires. Il est même parvenu à gagner une Listed à Vichy sur 2800 m, montant en 44 de valeur. Il finira à 10 ans en 23,5 de valeur, mais avec 245.000 € de gains.

 

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