Laurens, la fiancée de Robin des Bois gagne le Saint-Alary 2018

29/05/2018 - Grand Destin
 Bien qu'entraînée au nord de l'Angleterre par Karl Burke, Laurens, la gagnante de haute lutte du Prix de Saint-Alary 2018, est une pure française, fille de la star hexagonale Siyouni, née près de Soissons chez Melchior-François Mathet avant d'être vendue à Doncaster, dans la patrie de Robin des Bois.

Imaginez vous atterrir à La Teste dans un aérodrome qui s'appellerait Thierry La Fronde, pour être le premier étranger à inscrire un cheval dans une vente ultra-spécialisée dans la précocité, puis repartir en ayant fait le top price du jour avec une pouliche qui sera classique dès l'année suivante.

 


Laurens à la Premier Sale de Doncaster

 


Anna Sundstrom avec Henry Beeby, le grand patron de Goffs.

 

Voilà le vice versa de ce qui est arrivé à Laurens et son éleveur Melchior-François Mathet voici 2 ans, bien avant de remporter le Prix de Saint-Alary, son deuxième Gr.1, de retour sur la terre promise de ParisLongchamp. Fin août 2016, le fils de l'ancien sphinx de Gouvieux, François Mathet, qui fut aux années 60 et 70 ce que Fabre est devenu après son décès brutal en 1982, descend d'un petit avion à Doncaster tout au nord de l'Angleterre, là-même où a été située la légende de Robin des Bois, héros imaginaire du moyen-âge britannique qui détroussait les riches pour redistribuer aux pauvres à l'abri de sa chère forêt de Sherwood. En hommage, l'aéroport du coin s'appelle Robin Hood.
 


Doncaster, ce n'est pas la fête tous les jours....

 

Aujourd'hui, cette petite ville n'a pas bonne réputation dans le pays, très pauvre et pas très sûre en terme de sécurité, on y ressent la misère humaine d'une zone pluvieuse jamais sortie de l'après-tatchérisme...Mais au niveau des courses, Doncaster est célèbre pour abriter sur son hippodrome le plus vieux classique du monde, le fameux St Leger créé en 1776, ainsi que le dernier Gr.1 de l'année en Angleterre, le RacingPost Trophy. C'est aussi ici qu'une équipe d'écossais hargneux a créé il y a une trentaine d'années une agence de vente qui a beaucoup bousculé le paysage des rings anglais. Ses acteurs y ont créé les premières breeze up du vieux continent, et ont développé la " Premier Sale", une vente spécialisée dans les yearlings au profil très précoce, une vente qui s'adresse aux entraîneurs pas assez riches pour aller à Tattersalls, suivis par des clients qui ont besoin de voir rapidement les fruits de leurs investissements. La petite Doncaster Bloodstock Sale (DBS) a si bien grandi qu'elle a été rachetée voici 2 ans par les irlandais de Goffs, une agence séculaire dans la Verte Erin.

 


Melchior-François Mathet avec John Dance en polo rose à Doncaster.


Le Haras de Bourg Fontaine, à Villers Cotterets près de Soissons, s'étend autour de la chartreuse du même nom.

 

Un peu plus tôt dans l'année, Anna Sundstrom, la plus française des suédoises, créatrice de Coulonces Sales en Normandie, avait visité l'élevage de Melchior-François Mathet à Bourgfontaine, le haras qu'avait acheté son père pour y créer son élevage quand il était encore tout jeune. Installé lui-même un temps entraîneur à Chantilly, Melchior-François avait disparu des programmes pendant quelques années, devenant gestionnaire de biens en Suisse, mais avait commencé à remonter un effectif d'une vingtaine de poulinières, associé avec son frère, sur les terres familiales de Bourgfontaine. Lorsqu'elle découvre le physique de Laurens, Anna Sundstrom se dit qu'elle a devant elle une pouliche qui lui permettrait de tenter sa première expérience à Doncaster, dans un terrain inconnu puisque jamais un haras français n'avait jusque là présenté un seul yearling.

 

 

Le coup d'essai s'est transformé en coup de maître. La fille de Siyouni se vend £ 220.000, rentrant dans le top 3 de la vente, à Karl Burke, un entraîneur à la réputation solide, venu en voisin puisqu'il est aussi installé dans le Yorkshire. Il a choisi cette pouliche pour un nouvel investisseur nommé John Dance. Ancien jockey, Burke connaît bien les 2 ans et la France. Il a d'ailleurs remporté le Prix Morny 2017 avec Unfortunately. Anna Sundstrom est évidemment ravie de l'issue de l'aventure et explique alors sur place : " " Cela fait plusieurs années que je suis de près cette vente de Doncaster et j'ai pu constater que les yearlings qui en sortent obtiennent en course des résultats exceptionnels", explique Anna Drion. Car il n'y a pas que les prix sur le ring qui compte dans une vente, c'est surtout, pour nous qui avons les mères, les gens à qui ils sont vendus et les résultats qu'ils peuvent en obtenir en course. Or, ici, c'est une vente de professionnels avec des entraîneurs qui choisissent les chevaux. Comme il faut toujours s'ouvrir et que je souhaite faire connaître Coulonces à travers les frontières, j'ai donc décidé de venir ici cette année. Ici, j'ai la chance de rencontrer de très nombreux entraîneurs et propriétaires qui ne viennent jamais en France. Grâce aux ventes Arqana, le nom de Coulonces est connu et cela me permet de découvrir plein de monde ici, d'autant plus que tous me disent que nos chevaux sont remarquablement beaux ! "

 


Laurens, entourée de son entraîneur Karl Burke (à gauche), son jockey Patrick McDonald et son propriétaire John Dance (à droite) - Photo APRH

 

Et c'est ainsi que l'histoire de Laurens a commencé. Unique fille de Siyouni au catalogue, un étalon que les anglais apprécient d'autant plus à travers ses pouliches depuis le succès d'Ervediya chez eux dans les Coronation Stakes (Gr.1), Laurens descend d'une ancienne souche Aga Khan qui a donné beaucoup de chevaux bons et durs récemments sous des casaques diverses, comme Kinnaird, Salford Mill, Shifting Power, Ivawood, etc. VOIR LE PEDIGREE DE LAURENS

Très douée à 2 ans, elle a conclu 2ème du Prix du Calvados (Gr.3) à Deauville puis conclu sa 1ère campagne par un succès dans le Fillie's Mile (Gr.1). Dominée de très peu dans les 2000 Guinées de Newmarket pour sa rentrée, elle est revenue si fraîche de sa course que son entraîneur s'est décidé à la recourir une fois avant son objectif principal du Prix de Diane. Le Saint-Alary s'est imposé naturellement. Et bingo !

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