L'histoire de DNA Pedigree: Sadler's Wells, le grand seigneur

16/04/2020 - Grand Destin
Un grand seigneur ! Thierry Grandsir (DNA Pedigree) ne s'est pas trompé dans le choix de ses termes pour définir Sadler's Wells, excellent cheval de courses devenu ensuite reproducteur exceptionnel, sacré à 14 reprises meilleur étalon d'Europe grâce à des descendants tout aussi exceptionnels en piste qu'au haras. Découvrez sans plus attendre l'histoire de ce grand chef de race ! 

 

Sadler’s Wells (1981-2011) - Northern Dancer & Fairy Bridge (Bold Reason)
 
 
En l’an de grâce 1683, le gentleman Richard Sadler fonda une salle de spectacle au cœur du quartier londonnien de Islington, qu’il baptisa le Sadler’s Wells Theatre. La musique, le théâtre et surtout le ballet animèrent ce haut-lieu dans lequel plusieurs compagnies se succédèrent, et où quelques danseurs du Nord (Northern Dancer) se produisirent.
 
 
Ce théâtre inspira l’homme d’affaires Robert Sangster pour baptiser un de ses foals, né le 11 avril 1981 dans son haras américain (Swettenham Stud), de l’union entre Northern Dancer et la jeune Fairy Bridge, qu’il avait acquise yearling en 1976 à Keeneland contre seulement $40,000. Un investissement fort rentable en cette fille du très bien né Bold Reason (frère utérin de Never Bend par Hail to Reason) et de Special, d’abord parce qu’elle deviendra la sœur utérine du Champion Nureyev (Northern Dancer), et ensuite parce qu’elle décrochera le titre de co-Champion 2yo Filly en Irlande à la faveur de deux faciles victoires en autant de sorties !
 
Robert Sangster avait découvert le monde des courses en 1960 lorsqu’un de ses amis lui avait suggéré d’engager un pari sur un cheval, Chalk Stream, propriété de son grand-père. Tuyau percé, le cheval termine non placé, mais Robert Sangster décide de l’acheter, l’offre à sa fiancée, et remporte avec lui la Liverpool Autumn Cup dans sa ville natale !
 
En 1984, Robert Sangster est un homme heureux. Peut-être pas en amour (le deuxième de ses trois divorces est en cours), mais sa casaque est classique et son association avec John Magnier et l’entraîneur Vincent O’Brien, d’où la création de Coolmore Stud, s’avère efficace. Sept ans plus tôt, il avait gagné les plus grandes courses en Europe avec The Minstrel et Alleged, et la saison classique s’annonce au mieux avec ses trois ans El Gran Senor et Sadler’s Wells, tous deux invaincus à 2 ans.
 
El Gran Senor avait les faveurs de son entraîneur, qui lui avait offert de triompher dans les National St. (Gr.2) et dans les Dewhurst St. (Gr.1). En parallèle, Sadler’s Wells s’était adjugé deux victoires en autant de sorties dont les Beresford St. (Gr.2). Pour entamer leur saison classique, les deux poulains s’affrontent dans les Gladness St. (Gr.3) : El Gran Senor l’emporte devant Sadler’s Wells, et enchaîne sur les grands classiques (dominateur dans les 2000 Guineas St., il trébuchera de très peu dans le Derby de Secreto avant de remporter l’Irish Derby).
 
 
 
Jockey Club 1984 : Darshaan devance Sadler’s Wells et Rainbow Quest
 
 
Confirmé dans son rôle de doublure, Sadler’s Wells devance Baillamont et Secreto dans les Irish 2000 Guineas (Gr.1) puis s’intercalle entre Darshaan et Rainbow Quest à l’arrivée du Prix du Jockey Club (Gr.1). Une édition de la course, alors disputée sur 2400 m, dont le trio ne sera composé que de futurs grands Chefs de Race !
 
Maintenant débarassé de son grand rival El Gran Senor, sur la touche pour cause de problèmes de pieds, Sadler’s Wells résiste de peu au retour de la Championne Time Charter dans les Eclipse St. (Gr.1) et subit la loi de Teenoso dans les King George VI & Queen Elizabeth St. (Gr.1), avant un ultime succès dans les Irish Champion St. (Gr.1) et une défaite dans le Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1) de Sagace, sa dernière sortie.
 
De taille moyenne, arborant un cadre signé Hail to Reason, un peu long-jointé devant et limité en tenue, Sadler’s Wells aura laissé le souvenir d’un performer doté d’une grande souplesse, d’un excellent tempérament et d’énormément de courage, sans être véritablement un crack.
 
L’année 1985 sonne l’heure de la revanche. Sadler’s Wells intègre Coolmore Stud sans subir la concurrence de El Gran Senor qui, exporté aux USA, se révèlera peu fertile et décevant. La première production du Grand Seigneur Sadler’s Wells s’avèra quant à elle exceptionnelle : Braashee (Prix Royal Oak), French Glory (Rothmans International), In the Wings (Coronation Cup, Grand Prix de Saint-Cloud, Breeders’ Cup Turf), Old Vic (Prix du Jockey Club, Irish Derby), Prince of Dance et Scenic (dead-heat dans les Dewhurst St.). En 1987 naîtra Salsabil (1000 Guineas, Oaks, Irish Derby), et ainsi de suite jusqu’à sa réforme en 2008.
 
Le Chef de Race Sadler’s Wells explose tous les records : quatorze titres d’étalon tête de liste en Europe, du jamais vu depuis 1798 et les treize citations décrochées par le Chef de Race Highflyer. Il devint également le premier étalon ayant signé 318 gagnants de Stakes (sur 1736 foals, soit 18,3% de sa production totale), dont 70 lauréats de Gr.1. Il accumule les citations de titres de tête de liste des pères de 2 ans, des pères de mères et des pères de sauteurs, et il établit une lignée mâle dominante sur toute la planète course (Galileo, Montjeu et In the Wings en Europe, El Prado aux USA, Fort Wood en Afrique du Sud, etc).
 
Sadler’s Wells s’est éteint le 26 avril 2011, à l’âge vénérable de 30 ans. Son squelette est exposé au Fethard Horse Country Experience Museum, près de Coolmore Stud. Son nom, synonyme d’excellence et de tenue classique, est présent dans le pedigree de huit des dix derniers gagnants du Derby d’Epsom et de neuf des quatorze lauréats de Gr.1 du meeting 2017 de Cheltenham, où sa statue trône fièrement.
 
En 2020, la lignée mâle de Sadler’s Wells est représentée par 181 étalons actifs en Europe, dont 75 descendants de son fils Galileo. On peut fermer le Sadler’s Wells Theatre en période de confinement, mais on n’arrêtera jamais la génétique du Grand Seigneur Sadler’s Wells !
 
 
 
 
 
 

Voir aussi...