Comment l'Arabie Saoudite souhaite-t-elle devenir une place forte des courses mondiales ?

17/10/2023 - Actualités
Depuis quelques saisons, l’Arabie Saoudite imite la stratégie utilisée par ses voisins pour exister sur la scène mondiale : le soft power. Les courses hippiques faisant partie intégrante de ce projet, le Jockey Club national avait posé une première pierre en 2020 en créant la Saoudi Cup. Cependant le chemin reste encore long pour le Royaume.  

Mohammed Ben Salmane, prince hériter d'Arabie Saoudite avec l'entourage du vainqueur de la Saoudi Cup 2023


Pays le plus grand, le plus peuplé et le pus riche de la péninsule arabique, l’Arabie Saoudite a cependant longtemps été en retrait de ses voisins que sont le Qatar, les Emirats-Arabes Unis ou le Bahreïn en terme d’image et de pouvoir d’attraction. Depuis la prise de pouvoir de Mohammed Ben Salmane, le pays est bien décidé à rattraper son retard et à utiliser tous les outils disponibles pour gagner en poids géopolitique, ainsi que pour redorer son blason à l’international. Le gouvernement saoudien a alors mis en place un plan de développement nommé « Vision 2030 » qui vise à le faire progressivement sortir de sa rente pétrolière en diversifiant l’économie.

 
Mohammed Bel Salmane, à l'initiative du projet "Vision 2030"
  

Comme ses voisins, l’Arabie Saoudite investit massivement dans le divertissement. Comme ses voisins, le pays accueille son Grand Prix de Formule 1, accueille des combats de box diffusés en mondovision, crée des festivals de musique avec les plus grands DJ de la planète. Cet été, le royaume a été le principal agitateur du mercato de football, en faisant venir des vedettes évoluant en Europe comme Karim Benzema, Sadio Mané, Ngolo Kanté ou Riyad Mahrez. Le sport de par son exposition médiatique mondiale est un excellent moyen de mettre en avant son pays, avec l’objectif à terme d’augmenter d’une part le nombre de touriste, et d'autre part le nombre d’investisseurs et d’entreprises internationales sur le sol saoudien.
 
 
 Encore au sommet de son art, Karim Benzema a décidé de rejoindre l'Arabie Saoudite cet été
 
 
Et les courses dans tout cela ? Le sport des rois comme certains le qualifient n’échappe pas à cette politique globale. En 1965, le Prince Abdulla Bin Abdul Aziz ordonne la création du Jockey Club d’Arabie Saoudite pour soutenir les courses dont la situation se détériore inexorablement. Dès lors, de nouvelles règles sont mises en place et des hippodromes sont construits. Durant de nombreuses décennies, ce système a fonctionné en quasi autarcie, le pouvoir royal ne cherchant pas à attirer des investisseurs étrangers sur son sol. Depuis quelques saisons, et la prise de pouvoir de MBS, le Jockey Club a pris un virage à 90 degrés.
 
 
 King Abdulaziz, le principal hippodrome du pays
 
 
L’élément le plus marquant de cette nouvelle philosophie a été la création de la Saoudi Cup en 2020. Proposant une allocation pharaonique de 20 millions de dollars, cette épreuve est instantanément devenue la course la plus richement dotée du monde, dépassant la Dubai World Cup. Comme les Emirats 25 ans plus tôt, l’Arabie Saoudite a mis à profit sa manne financière pour tenter d’attirer les regards et les grands de ce monde sur son sol. Et ce pari fut réussi. Lors des quatre premières éditions, certains des meilleurs pur sang de la planète ont fait le déplacement depuis les Etats-Unis, le Japon, la France, l’Angleterre, l’Irlande pour venir s’affronter.
 
 
   En 2023, le japonais Panthalassa devançait l'américain Country Grammer dans la Saoudi Cup
 
 
La Saoudi Cup est une première étape réussie, mais le chantier reste encore grand, puisque la volonté du pays était d’attirer les investisseurs sur le long terme, pas le temps d’un week-end. Lorsque l’on regarde les noms qui figurent en tête des classements annuels chez les entraîneurs, propriétaires et jockeys, aucun n’a de résonnance internationale. Le Qatar, les Emirats et le Bahreïn, qui sont des pays bien plus petits ont toujours un pouvoir d’attraction bien supérieur à celui de l’Arabie Saoudite. Cet été, plusieurs entraîneurs basés en Angleterre de renom, comme Marco Botti ont annoncé qu’ils allaient établir cet hiver une antenne à Dubaï, où les allocations sont infiniment plus attrayantes que dans leur pays.
 
 
 L'italien Marco Botti a décidé de s'installer au Moyen Orient cet hiver
 
 
L’Arabie Soudite a donc un retard d’image à combler par rapport aux autres pays de sa péninsule, mais bénéficie de l’aide de ses voisins grâce au Conseil de Cooperation du Golfe. En effet, les relations entre l’Arabie Saoudite et le Qatar se sont nettement réchauffées ces dernières années. Ces états préfèrent désormais tirer tous dans le même sens, pour le bien commun de la région. Alors certes, l’Arabie Saoudite ne deviendra pas la place centrale des courses mondiales en un clin d’œil, mais le pays peut compter sur des ressources quasiment illimitées et surtout le support d’une population nationale de 35 millions d’habitants passionnés de chevaux et de courses.

 

Voir aussi...