Les archives France Sire : la famille Wildenstein et le Prix de Diane, 50 ans d'histoire

14/06/2023 - Grand Destin
Ce dimanche, la belle Pensée du Jour tentera de remporter le Prix de Diane et d’apporter un sixième trophée à ses propriétaires, la famille Wildenstein. Cette historique casaque des courses française avait signé son premier succès dans la course il y a 50 ans, avec une certaine Allez France. Avec France Galop.

 Pensée du Jour tentera d'offir un 6e sacre aux Wildenstein dans le Diane ©APRH


Si le premier sacre dans le Diane pour la famille Wildenstein est intervenu il y a 50 ans, l’aventure de la casaque bleue toque bleu ciel a démarré bien avant. Il y a 100 ans Georges Wildentstein (le père de Daniel), un puissant marchand d’art et galeriste, fait l’acquisition de trois 2 ans, deux poulains et une pouliche. Dès le début, Georges voit sa casaque briller en plat, mais aussi en obstacle, son premier poulain Baal ayant remporté le Steeple-Chase des 4 ans à Enghien. Le premier succès de Groupe en plat intervient dès 1925, lorsque Licteur remporta les Prix d’Aremberg et Daphnis. Au fil des années, grâce à des bons achats aux ventes, les succès en piste s’accumulent et George Wildenstein décide alors de développer un élevage. Au début des années 40, la guerre éclate en Europe et les Wildenstein quittent l’Europe pour New York afin d’échapper à la répression des nazis contre les juifs. 
 
 

Georges Wildenstein et son jeune fils Daniel
1973 : Premier succès avec l'exceptionnelle Allez France
 
Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, les Wildenstein vont reprendre leurs activités dans les courses, et petit à petit Daniel va prendre le relais de son père Georges. Ambitieux, Daniel donnera à l’élevage familial une tout autre envergure. Pourtant, la plus grande championne ayant fait briller la casaque bleue n’est pas originaire de cet élevage. En 1971, est présenté lors d’une vente aux États-Unis une pouliche yearling issue de Sea-Bird et Priceless Gem, une des meilleures 2 ans de sa génération. Ce pedigree attire l’attention de Daniel Wildenstein, qui ne pouvant se rendre sur place indique à son courtier : « Si la pouliche est baie et ressemble à sa mère, vous l’achetez. Mais si elle ressemble à son père, vous l’oubliez ! ». La pièce est tombée du bon côté, et cette pouliche baie sera achetée, et nommée plus tard Allez France. Dotée d’un tempérament volcanique, la pouliche sera accompagnée toute sa vie d’un mouton nommé Bastian. En piste, Allez France marquera l’histoire étant sacrée cheval de l’année à 2, 3, 4 et 5 ans. Le 10 juin 1973, après 50 ans d’attente, elle offre à la casaque Wildenstein un premier sacre dans le Prix de Diane.
 
 
 Daniel Wildenstein à la tête de la championne Allez France après sa victoire dans le Diane 1973 ©APRH
 
 
1976 et 1977 : Pawneese et Madelia avec l'argentin Angel Penna
 
En 1974, Daniel Wildenstein change d’entraîneur, et transfert son effectif de chez Albert Klimscha à chez l’argentin Angel Penna. En 1975, le Prix de Diane ne se disputera pas à cause de la grève des lads. Mais l’année suivante, Daniel Wildenstein alignera au départ Pawneese. Cette puissante fille de Carvin tente un défi qui n’a plus été réussi depuis plus de 100 ans, à savoir remporter les Oaks et le Prix de Diane, en l’espace de 9 jours. Dans ces conditions, les parieurs lui avaient préféré ce jour-là la pouliche d'Alec Head Riverqueen, invaincue et déjà double lauréate de Gr. 1. Sur la piste, le match va avoir lieu, mais Pawneese se montra la plus forte. 1976 fut une année faste pour la casaque, car en plus de ce doublé Oaks-Diane, Flying Water s’était adjugée les 1000 Guinées à Newmarket.
 
 
Pawneese s'est balladée dans le Diane 1976, neuf jours après avoir enlevé les Oaks ©APRH
 
 
L’année suivante, Daniel Wildenstein présente de nouveau la favorite du Prix de Diane, Madelia. La pouliche tentait alors de devenir la deuxième à remporter la « Triple Couronne », à savoir la Poule, le Saint Alary et le Diane. Présentée à la cote d’1.4/1, Madelia semble au-dessus du lot dans la dernière ligne droite. Soudainement, à 150 mètres du poteau, après avoir changé de jambe, elle verse sur sa gauche, avant de se jeter sur sa droite. Yves Saint-Martin aura toutes les peines du monde à empêcher sa partenaire de rentrer en collision avec la rivale Trillon. Par chance le poteau arrivait, et Madelia parvint à conserver une courte tête d’avance sur Trillon. Une troisième couronne dans le Diane à l’émotion particulière pour Daniel Wildenstein. La pouliche qui a été victime d’une fêlure du boulet ne sera plus revue en piste. Au haras, elle donnera 5 black types, dont Moonlight Dance, qui après un succès dans le Prix Saint Alary, ne courra pas le Prix de Diane, mais tentera sa chance (sans réussite) face aux mâles dans le Prix du Jockey Club.
 
 
Madelia et son entraîneur, l'argentin Angel Penna après le Diane 1977 ©APRH
 
Sylvie Vartan remettant le trophée à Daniel Wildenstein ©APRH 
 

2001 et 2002 :  Aquarelliste et Bright Sky, le retour d'Elie Lellouche
 
Si les années 80 et 90 sont riches en succès, avec entre autres le doublé Jockey Club/Arc de Peintre Célèbre, Daniel Wildenstein connait une période de disette dans le Diane. Au printemps 2001, après une période de turbulence, il décide de rompre le contrat de première monte d’Olivier Peslier, et de retirer ses 42 pensionnaire de l’écurie d’André Fabre. Ainsi, à quelques semaines du Diane, les chevaux retournent sous la coupe d’Elie Lellouche, et Dominique Bœuf ancien premier jockey de l’écurie est appelé à la rescousse. L’espoir numéro 1 de l’écurie Wildenstein cette année là s’appelle Aquarelliste. Cette fille de Danehill n’a pas couru à 2 ans, et a débuté victorieusement au mois d’avril. Après une plaisante victoire dans le Prix Mélisande (L.), elle se présente en tant que favorite le jour du Diane. Le déroulement de course va être quelque peu chaotique. Dès lors Dominique Bœuf prend l’initiative de sortir dans le dernier tournant. La pouliche se retrouva certes en épaisseur nez au vent, mais aura toutes ses aises. A l’issue d’un superbe rush final, Aquarelliste viendra à bout de la britannique Nadia et Frankie Dettori.
 
 
   La championne Aquarelliste dans le Diane 2001 ©APRH
 
Absent des célébrations, Daniel Wildenstein décèdera quelques mois après le sacre d'Aquarelliste ©APRH
 

Comme en 1976-77, la famille Wildenstein réalisa le doublé dans le Diane, en 2001-02. Plus précoce que son aînée Aquarelliste, Bright Sky débuta sa carrière en juillet de ses 2 ans, sous la férule de Dominique Sepulchre. Lors de ses premiers pas à Clairefontaine, la fille de Wolfhound est « restée au poteau » perdant ainsi de nombreuses longueurs. Malgré cela, Bright Sky passa le peloton en revue, et domina notamment Ana Marie, future double lauréate de Groupe et placée de Gr.1. Après ces débuts tonitruants, Dominique Bœuf conseille aux Wildenstein de faire « monter » la pouliche à Chantilly chez Elie Lellouche. Deuxième des Prix Finlanlande (L.), Vanteaux (Gr.3) (derrière Ana Marie) et Saint Alary (Gr.1), Bright Sky n’arrive pas le Jour J avec le costume de favorite. Contrairement à l’édition 2001, le rythme va être très élevé. Dès lors, Bright Sky s’en trouva avantagée. Montée patiemment, Bright Sky allait placer une accélération foudroyante pour l’emporter. Ce succès intervient quelques mois après le décès de Daniel Wildenstein, et restera comme le dernier en date de la casaque bleue.
 
 
Toute la rage de Dominique Boeuf lors du sacre de Bright Sky en 2002, le dernier Diane des Wildenstein ©APRH 
 
 
Alec Wildenstein venant féliciter sa pouliche et son jockey ©APRH
 
 
Vente de succession, et retour en grâce
 
Après le décès de Daniel, c'est son fils Alec qui reprendra le flambeau de l’élevage et de l’écurie. Les bleus toque bleu ciel vont continuer à être sur le devant de la scène jusqu’au milieu des années 2010. En 2012, Beauty Parlour remporta de très plaisante manière la Poule d’Essai des Pouliches. Favorite du Diane, elle va cependant tomber ce jour-là sur l’Aga Khan Valyra, privant ainsi ses propriétaires d’une sixième couronne dans la course. En 2016, plus de 100 chevaux issus de l’élevage et de l’écurie Wildenstein sont présentés en vente chez Goffs en Irlande. L’américain Peter Brant avait alors déboursé plus de 5 millions d’euros pour mettre la main sur 10 juments, dont Beauty Parlour. Malgré tout, le coup d’arrêt ne fut pas total pour la famille Wildenstein. Sous le nom Dayton Investment Ltd, Guy Wildenstein (l'autre fils de Daniel), continue d’élever et de faire courir, sous une casaque bleue manche et toque bleu ciel. Plus de 20 ans après le dernier sacre dans le Prix de Diane, la famille Wildenstein pourrait revenir sur le devant de la scène, grâce à Pensée du Jour, une lointaine descendante de Pawneese !
 
 
   En 2012, Beauty Parlour avait été dominée par Valyra ©Scoop Dyga

Voir aussi...